Projet pastoral

A travers les 5 essentiels (Adoration, Belle fraternité, Charité-service, Disciple – Formation, Evangélisation), nous voulons vivre une dynamique de croissance et construire une communauté paroissiale composée de disciples missionnaires. Ancrés dans le Christ, nous sommes habités par le désir de l’annoncer.

Paroisse Saint-Pierre-Saint-Paul de Courbevoie          Dimanche 3 octobre 2021

Voulezvous que la paroisse entre dans un profond sommeil, comme la Belle au bois dormant? Voulezvous que la paroisse se meure ? Non ! Alors, j’ai besoin de vous tous.

Nous venons de vivre près de deux ans de pandémie et notre communauté a subi des défections et des coups, au même titre que les entreprises, les associations, les clubs, les cinémas, les salles de spectacle ou les restaurants. Toutes ces activités-ci doivent reconquérir leur clientèle et nous, paroissiens de SaintPierreSaintPaul de Courbevoie, nous devons partir à la pêche. Jésus ne disait-il pas à saint Pierre, le jour où il l’appelait sur le lac de Galilée après la pêche miraculeuse : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. » Peutêtre considérez-vous le passé avec nostalgie ? C’était si bien au bon vieux temps ! Peutêtre tournezvous le regard vers cet âge d’or qui n’est plus, lorsque l’église était pleine, lorsque les salles de catéchisme ou d’aumônerie étaient combles. Je n’ai jamais connu cette époque et je ne la connaîtrai certainement pas. Allons-nous baisser les bras pour autantet démissionner à notre tour ? Non, nous allons nous retrousser les manches et commencer une nouvelle aventure. Nous allons nous mobiliser, pour affirmer que Dieu est toujours là, même si nous nous croyons parfois un peu abandonnés. Nous sommes convaincus que Dieu a besoin de nous, pour continuer à transmettre sa vie et sa miséricorde sur le monde. La fête de la rentrée paroissiale aujourd’hui en est un vibrant témoignage et je remercie déjà tous les acteurs de la réussite de cette journée, malgré la pluie envoyée par le créateur ! La vitalité est à l’œuvre dans notre vie paroissiale et nous voulons encore témoigner autour de nous, pour ne laisser personne indifférent à l’expérience fondamentale et transformante que nous faisons de Dieu. En ce mois d’octobre, l’intention de prière du pape François à l’adresse des chrétiens est la suivante « Prions pour que chaque baptisé soit impliqué dans l’évangélisation et disponible pour la mission, à travers un témoignage de vie ayant le goût de l’Évangile. » Soyons donc convaincus d’une chose : nous sommes revenus au temps des premiers chrétiens, comme les douze apôtres dans le livre des Actes dans le Nouveau Testament ; c’est pourquoile pape veut faire de chacun de nous un disciple missionnaire à l’exemple de ses apôtres. Pour cela, il existe certainement de nombreuses recettes. Je vous en propose une seule qui est testéedepuis des années par plusieurs paroisses et qui porte aujourd’hui des fruits de fécondité. Certaines de ces paroisses sont même à nos portes, à quelques kilomètres d’ici.

Je veux donc embarquer la paroisse dans un élan de vie chrétienne à la fois personnelle et communautaire, habitée par le souffle de l’Esprit Saint. C’est un élan qui repose sur cinqdynamiques de croissance, cinq sources de fécondité, que l’on appelle aussi les cinqessentiels, les cinq essences de la vie chrétienne, qui sont représentées sur le beau tableau peint par Isabelle. Ces cinq essentiels sont un peu comme cinq vitamines qui vont doper la paroisse, qui vont donner une impulsion, une force spirituelle à chacun personnellement, à chaque équipe, à chaque activité, à chaque groupe qui se rencontre, à chaque pôle paroissial. Il s’agit d’entrer dans une démarche de croissance de la paroisse, qui fasse de chacun un disciplemissionnaire prêt à former d’autres personnes qui deviendront à leur tour des disciples et des missionnaires de l’évangile de Jésus-Christ. Il importe donc de comprendre la logique de ces cinq essentiels.

La première vitamine est la vitamine A : A comme Adoration. Il s’agit tout simplement de rencontrer Dieu, de se tenir en sa présence, de l’aimer et de se laisser aimer par lui. Il s’agit donc d’ancrer sa vie dans le Christ en faisant l’expérience d’une relation personnelle et vivante avec Jésus. Adorer, c’est prier, célébrer, louer, rendre grâce, intercéder, personnellement ou en petit groupe ou en communauté, à travers de belles liturgies, qui soient attirantes etinspirantes, parfois animées par une chorale priante. Nous avons multiplié les adorations du Saint-Sacrement. Nous lancerons cette année des veillées de prière et des messes des jeunes le dimanche soir et nous soignerons la liturgie avec des équipes liturgiques de choc. Adorer, c’est pour chacun se reconnaître fils ou fille de Dieu. C’est la première étape essentielle.

La deuxième vitamine est la vitamine B : B comme Belle fraternité. Il s’agit de vivre l’amour du prochain, l’accueil et le soutien mutuel, dans des petits groupes d’Église de taille familialeou en équipe ou en maisonnée. Cette fraternité favorise ainsi l’insertion de chacun dans la communauté chrétienne. Car en vivant une belle fraternité, on partage la vie, la foi et la prière. Nous avons multiplié les équipes de fraternité l’an passé et nous continuerons à le faire cette année, parce qu’un chrétien ne peut pas vivre tout seul sa foi, il doit l’entretenir et la partager. Chacun se reconnaît donc frère ou sœur en Jésus. C’est la deuxième étape essentielle.

La troisième vitamine est la vitamine C : C comme Charité, une charité active et serviable à l’image du Christ qui lave les pieds de ses disciples. Il s’agit de s’engager dans la communauté pour en servir la vitalité et la fécondité. Il s’agit aussi de discerner chez soi et chez les autresles talents ou les charismes, favoriser la prise de responsabilité du plus grand nombre, appeler à s’engager. Il y a à Saint-Pierre-Saint-Paul tant de services à rendre. Venez nous aider ! Je m’émerveille de voir des paroissiens prendre en charge la sacristie ou prendre un temps d’accueil aux messes ou au presbytère. Quel dévouement ! La communauté s’organise alors pour accomplir efficacement sa mission à l’intérieur d’elle-même et à l’extérieur d’elle-même. On partage ainsi ce que l’on a reçu et on sert ses frères et sœurs en Christ en fonction de ses capacités ou de ses compétences. Chacun se reconnaît donc serviteur au sein de la communauté. C’est la troisième étape essentielle.

La quatrième vitamine est la vitamine D : D comme Disciple. Il s’agit de grandir, de poursuivre la conversion de son cœur, de développer son intelligence de la foi, de discerner et de cultiver ses talents et ses charismes. C’est comme un chemin catéchuménal où l’on progresse dans la foi ou encore c’est comme une formation permanente, pour que la foi reste vivace. On éprouve le besoin de se former. Et cette année, nous multiplions justement les offres de formation : étude biblique, étude théologique, découverte de ce qu’est l’Église verte.C’est pour cela que chacun doit se reconnaître disciple en se mettant à l’école du Christ. C’est la quatrième étape essentielle.

La cinquième vitamine est la vitamine E : E comme évangélisation. Il s’agit d’annoncer Jésus-Christ mort et ressuscité pour nous à ceux qui ne le connaissent pas encore. Il s’agit de conduire à Jésus, de faire découvrir aux autres autour de soi l’amour de Jésus, de témoigner de son expérience de Dieu. Je sais qu’il y a quelques années vous avez vécu l’aventure de Saint-Pierre-Saint-Paul-hors-les murs pendant le temps de l’Avent. Nous réinventerons des actions d’évangélisation. Et chacun reboosté par les quatre premières vitamines pourra éprouver le besoin et le désir d’annoncer le Christ. C’est ainsi que je chacun peut se reconnaître apôtre du Seigneur. C’est la cinquième étape essentielle.

Voilà un chemin de croissance que chacun cherchera à vivre personnellement cette année, en acceptant de développer ces cinq potentialités dans sa vie de foi, sans oublier un seul de ces aspects. En effet, je ne peux pas prier et par ailleurs oublier de me former ou de vivre la fraternité qui est pourtant un commandement de Jésus. Je ne peux pas servir mes frères et ne pas chercher à évangéliser ceux qui sont à la porte de l’église et qui peut-être essaient del’entrouvrir avec inquiétude ou interrogation. Exercer ces cinq essentiels rendra ma foi vive et active et éveillera la foi des personnes que je rencontrerai.

Ce chemin de croissance est aussi un chemin pour toute la communauté. Je souhaite donc que chaque groupe paroissial, chaque activité, chaque rencontre soit l’occasion de mettre en œuvre ces cinq piliers. Comment voulez-vous être un véritable fils de Dieu, ou une véritable fille de Dieu, si vous n’êtes pas capable de vivre la fraternité, de partager la foi et de servir votre prochain ? Il manque nécessairement une corde à votre arc.

Ce cheminement se fait bien évidemment dans le temps, pour que chacun puisse vivre une conversion intérieure, grandisse en maturité, soit en communion avec ses frères et sœurs et devienne un vrai témoin du Christ. Jésus nous le demande : « Allez et de toutes les nations faites des disciples. » Il me semble donc que la multiplication de groupes de fraternité, où s’exerceront ces cinq essentiels, permettra à ce processus de se propulser en avant.

Voilà pourquoi ma vision pour la paroisse est la suivante. Je veux construire avec vous tous une communauté paroissiale composée de disciplesmissionnaires dans une dynamique de croissance grâce aux cinq essentiels. Qui que vous soyez, jeunes ou vieux, consommateurs ou acteurs dans la paroisse, je ne veux pas faire de vous seulement des disciples qui seraient enfermés dans l’organisation de la paroisse, je ne veux pas faire de vous non plus seulementdes missionnaires à l’extérieur qui n’auraient plus de vie intérieure dans le cœur de l’Église et à la table de l’eucharistie. Je veux faire de vous des disciplesmissionnaires. Enracinés dans le Christ, je veux que vous soyez habités par le désir de l’annoncer. Je dirais même davantage : plus vous serez enracinés dans le Christ, plus vous désirerez vivre en fraternité ecclésiale, servir votre prochain, affermir votre foi, et par voie de conséquence, annoncer l’Évangile à ceux qui ne le connaissent pas, ou si peu…

Voulez-vous me suivre sur ce chemin exaltant ? Peut-être avez-vous une incompréhension, une hésitation, une inquiétude, un instant de recul, un sentiment de vertige. Il est vrai que je veux vous embarquer au loin, vers l’inconnu. Pourtant ma vision est claire et large : je veux vous conduire au Christ ! Voulez-vous que nous soyons tous embrasés par l’Esprit du Christ et que nous embrasions aussi le monde ? Voilà qui donnera du souffle et du tonus à la vie !

Père Yvan Maréchal, curé

Homélie du dimanche 3 octobre 2021

27ième dimanche B

Rentrée paroissiale placée sous le signe de la création et de saint François

Lectures : Gn 2,18-24 ; Ps 148 ; Ap 22,1-7 ; Mc 10,2-16

« La beauté sauvera le monde. » Avez-vous déjà entendu cet adage ? Il s’agit d’une citation tirée de L’idiot, un roman de Dostoïevski. Aujourd’hui nous voulons justement chanter la beauté qui nous fait rejoindre celui qui en est la source : Dieu que nous glorifions. Même si la beauté réserve à chacun une sensation forte et subjective, qui fait dire à l’un qu’une chose est belle et à un autre qu’elle ne l’est pas, il existe des images, des objets ou des spectacles, qui transcendent le goût de chacun et désignent une sorte de beauté originelle et universelle.

La création est de cet ordre. Lorsque cet été je me trouvais sur un voilier devant un coucher de soleil sublime, où je voyais à l’horizon l’astre plonger dans la mer, j’étais subjugué par ce spectacle. Et ici chacun pourrait se lever à son tour, pour évoquer une impression esthétique qui l’a marqué à vie et nous communiquer cette émotion d’un instant qui se prolonge encore. Comment alors ne pas s’étonner que la Bible commence en Genèse par le récit de la création,pour exposer l’origine de l’espace et du temps où nous vivons, et que cette même parole de Dieu s’achève en Apocalypse sur la création avec une vision paradisiaque de l’arbre de vie qui donne des fruits en abondance en un jour infini dont la lumière n’est plus celle du soleil, mais de Dieu lui-même illuminant un monde transfiguré.

« La beauté sauvera le monde. » Et aujourd’hui, Jésus nous fait contempler cette beauté qui rayonne dans l’amour réciproque d’un homme et d’une femme. Dans l’Évangile, des pharisiens veulent piéger Jésus sur la question de la répudiation, permise par Moïse, disent-ils, à cause de la dureté du cœur de l’homme. C’est alors que Jésus fait surgir l’union sacrée des origines, il la fait remonter au projet que Dieu a voulu pour l’humanité : « Au commencement de la création, Dieu les fit homme et femme. À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux deviendront une seule chair. » Jésus rappelle ainsi l’importance de la dualité, de la différence sexuelle, de la relation établie dans le dialogue, faite de distance et d’intimité entre l’homme et la femme s’enrichissant mutuellement des dons qu’ils s’échangent.

C’est cette beauté de l’amour que décrit le second récit de la création, dans la première lecture, le deuxième chapitre de la Genèse. Au cœur d’un jardin où coule des fleuves d’eaux vives et où s’élève l’arbre de vie, précurseur de l’arbre de la croix du Christ, Dieu est présenté comme un potier, comme un artiste qui façonne l’homme primordial avec de la terre. Pour tromper la solitude de l’homme, Dieu doit ensuite lui amener une aide qui lui corresponde, une alliée qui sera à égalité face à lui. Écoutons le cri de jubilation de l’homme : « Cette fois-ci, voilà l’os de mes os et la chair de ma chair ! » La femme acquiert ainsi l’os et la chair de l’homme, c’est-à-dire ce qui constitue son intimité, elle devient l’être même de son être, elle est tenue pour une personne de sa parenté qui lui offre son achèvement, sa pleine humanité. Et tous deux se tiennent face-à-face dans la rencontre et le respect de l’autre. On peut dire que c’est seulement au moment où l’homme et la femme entrent en communion et deviennent une seule chair que la création est achevée vraiment et que l’image de Dieu est pleinement inscrite dans les créatures humaines. Tout seul l’être humain ne réalise pas entièrement ce qu’il est,car il ne l’accomplit qu’en existant avec quelqu’un ou en existant pour quelqu’un. Cette relation lui permet alors de vivre dans le don. C’est ainsi que l’union de l’homme et de la femme est l’image de l’union des trois personnes de la Trinité, l’union de l’amour du Père, du Fils et du Saint Esprit. « Ce mystère est grand », dira un jour saint Paul.

« La beauté sauvera le monde. » Par conséquent, pour un chrétien, est-il abusif de dire que cette beauté qui sauvera le monde est le Christ sauveur, qui selon l’expression d’un Psaume est « le plus beau des enfants de l’homme » (Ps 44,3), venu rendre à l’homme sa beauté première ? C’est pourquoi, quand un chrétien regarde un visage, il voit le visage du Christ. Le regard qu’il porte sur lui dépasse le sensible pour rejoindre la profondeur de l’être, et partant la présence de Dieu. La philosophe française Simone Weil, décédée au milieu de la seconde guerre mondiale, écrivait : « Dans tout ce qui suscite en nous le sentiment pur et authentique de la beauté, il y a réellement la présence de Dieu. Il y a presque une incarnation de Dieu dans le monde, dont la beauté est le signe. » Et il y a quelques années, le pape Benoît XVIcommentait cet auteur en disant : « La beauté – de celle qui se manifeste dans l’univers et dans la nature à celle qui s’exprime dans les créations artistiques – peut devenir une voie vers le Transcendant, vers le Mystère ultime, vers Dieu, précisément en raison de sa capacité essentielle à ouvrir et élargir les horizons de la conscience humaine, à la renvoyer au-delà d’elle-même, à se pencher sur l’abîme de l’Infini. »

Nous comprenons alors que la beauté qui sauve est inséparable de la bonté. En Dieu beauté et bonté se confondent. Celui qui fait du bien produit en même temps du beau. Par son travail dans le jardin, Adam poursuit l’acte créateur beau et bon du Seigneur. Par leurs activités, par leurs techniques, par leurs arts, les hommes prolongent l’œuvre belle et bonne du créateur. Cependant, trop souvent ils se l’approprient et ils la détruisent par leur volonté de possession, de puissance et de domination. La beauté d’un paysage, la beauté d’une composition musicale, la beauté d’un geste humain, la beauté d’un visage jeune ou ridé, apaisent, guérissent et restaurent l’harmonie. L’harmonie ne se dit-elle pas cosmos en grec ? Si donc« la beauté sauvera le monde », c’est parce qu’elle nous oriente vers la création nouvelle, où seul le sauveur nous mène. N’avons-nous pas pour mission de témoigner de cette beauté qui élève vers le haut, vers le ciel ?

Quelques mois avant sa mort le 3 octobre 1226 à l’âge de 44 ans, saint François d’Assise devenu aveugle compose son Cantique de frère soleil, où il déclame son émerveillement devant le monde et son amour fraternel des créatures : « Laudato si ! Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures, spécialement messire frère Soleil, par qui tu nous donnes le jour, la lumière ; il est beau. » Loué sois-tu pour sœur Lune, pour frère Vent, pour notre sœur Eau, pour frère Feu, pour sœur notre mère la Terre, pour ceux qui pardonnent, pour notre sœur la Mort corporelle. La création tout entière devient lumineuse depuis le surgissement de la lumière jusqu’à l’heure de la mort. Au milieu d’un siècle féodal déchiré par des guerres intestines entre les cités et leurs podestats, le poète saint François renonce àposséder le monde pour se diriger vers la contemplation. Il se réjouit en toute créature, parce qu’il s’abstient d’en posséder aucune. Il préfère s’évader dans la campagne, parler aux oiseaux ou sermonner le loup de Gubbio. Il préfère fréquenter les lépreux de son temps, répandre la joie parfaite sur ses frères mineurs ou discuter avec le sultan d’Égypte. Il découvre ainsi l’interaction entre le monde naturel et le monde humain. En restaurant l’Église de son temps, il veut plonger le monde entier dans un esprit de réconciliation, de fraternité et de louange.

« La beauté sauvera le monde », écrivait Fiodor Dostoïevski. Huit cents ans après frère François, soyons certains que tout ce que nous entreprendrons localement et à notre mesure sera peut-être une goutte d’eau dans un océan, mais aura un retentissement au-delà des familles, des paroisses ou des localités où nous vivons. La haine produira encore de la haine. L’amour propulsera un élan d’amour. L’appropriation de tous les biens de la terre entraînera sa destruction. Le soin de la création qui nous a été confiée stimulera le souci de l’humanité, et surtout du plus faible et du plus pauvre. Le pape François, inspiré par la figure du Poverellod’Assise, ne nous enseigne rien d’autre de sa première encyclique Laudato si à sa dernièreencyclique Fratelli tutti. Suivons-le ! Amen !

Père Yvan Maréchal

Chants

Dimanche 26 septembre


Entree : L’ESPRIT DE DIEU REPOSE SUR MOI

L’Esprit de Dieu repose sur moi,
L’Esprit de Dieu m’a consacré,
L’Esprit de Dieu m’a envoyé proclamer la paix, la joie.

1. L’ESPRIT DE DIEU M’A CHOISI
POUR ÉTENDRE LE RÈGNE DU CHRIST PARMI LES NATIONS,
POUR PROCLAMER LA BONNE NOUVELLE À SES PAUVRES.
J’EXULTE DE JOIE EN DIEU, MON SAUVEUR !
 
2. L’ESPRIT DE DIEU M’A CHOISI
POUR ÉTENDRE LE RÈGNE DU CHRIST PARMI LES NATIONS,
POUR CONSOLER LES CŒURS ACCABLÉS DE SOUFFRANCE.
J’EXULTE DE JOIE EN DIEU, MON SAUVEUR !
 
3. L’ESPRIT DE DIEU M’A CHOISI
POUR ÉTENDRE LE RÈGNE DU CHRIST PARMI LES NATIONS,
POUR ANNONCER LA GRÂCE DE LA DÉLIVRANCE.
J’EXULTE DE JOIE EN DIEU, MON SAUVEUR !

COMMUNION : APPROCHONS-NOUS DE LA TABLE

 

1. Approchons-nous de la table Où le Christ va s´offrir parmi nous.
Offrons-lui ce que nous sommes, Car le Christ va nous transformer en lui.

2. Voici l´admirable échange Où le Christ prend sur lui nos péchés.
Mettons-nous-en sa présence, Il nous revêt de sa divinité.

3. Père, nous te rendons grâce Pour ton Fils, Jésus-Christ le Seigneur.
Par ton Esprit de puissance, Rends-nous digne de vivre de tes dons.

Sortie : RENDONS GLOIRE A NOTRE DIEU

Rendons gloire à notre Dieu ! Lui qui fit des merveilles,
Il est présent au milieu de nous Maintenant et à jamais !

1. Louons notre Seigneur, Car grande est sa puissance, Lui qui nous a créés, Nous a donné la vie.

2. Invoquons notre Dieu, Demandons-lui sa grâce, Il est notre Sauveur, Notre libérateur.

3. Oui le Seigneur nous aime, Il s´est livré pour nous.
Unis en son amour, Nous exultons de joie.

Homélie du 27 juin 2021 

Textes du 13ème dimanche   Année A

par le père Jean Paul Cazes

Sg 1,13-15 + 2,23-24     Ps 29 (30)     2 Co 8,7+9+13-15     Mc 5,21-43

Quel est le mot, ou la phrase, qui vous a personnellement touché en écoutant les trois passages bibliques de ce jour ? Quelle est la phrase que vous allez emporter de cette messe pour vous la répéter tout au long de la semaine, la ruminer pour en vivre ? Si l’Eglise prend la peine de nous donner trois textes chaque dimanche, c’est pour qu’ils nous servent dans la semaine qui suit.

Je vous cite quelques-unes de ces phrases.

Dans le livre de la Sagesse :

= Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants.

= La puissance de la mort ne règne pas sur la terre

= Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité

Dans la lettre de Paul aux chrétiens de Corinthe :

  • = …vous avez tout en abondance : la foi, la Parole, la connaissance de Dieu
  • = (Jésus-Christ) qui est riche, s’est fait pauvre
  • à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté.

Dans l’Evangile :

  • = Viens imposer les mains (à ma fille) pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive
  • = Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée
  • =Jésus se rendit compte qu’une force était sortie de lui
  • = La femme, saisie de crainte … vint se jeter aux pieds (de Jésus)
  • = Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal.
  • = Ne crains pas, crois seulement
  • = Jeune fille, je te le dis, lève-toi.

Voilà ma sélection ; il est probable que la vôtre serait différente, mais peu importe ?

Est-ce l’une de ces phrases, ou une autre, que vous allez retenir tout au long de la semaine ?

Il existe plusieurs techniques pour se souvenir d’une phrase :

  • = on la surligne en couleur dans son missel ou son Prions en Eglise
  • = on l’écrit dans son agenda
  • = on la colle sur la porte du frigo
  • = on la place en évidence sur sa table de nuit

L’important, c’est qu’elle habite notre mémoire et nous serve de guide spirituel au long de la semaine.

Ce peut être une phrase dans laquelle on se reconnaît, dans laquelle on reconnaît le problème ou la difficulté qui nous habite comme, par exemple :

« Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. »

Ou bien ce peut être un mot qui secoue notre faiblesse dans la foi, notre doute, nos peurs :

« Ne crains pas, crois seulement. »

Ou bien alors ce peut être une phrase qui heurte nos connaissances, ou notre expérience, du genre :

« Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. »

Je vais rester quelques instants sur cette phrase pour la méditer, en espérant ne blesser aucun d’entre vous qui serait dans la peine ou le deuil.

« Dieu n’a pas fait la mort ».

De quelle mort parle l’auteur du livre de la Sagesse ?

Si c’est de la mort physique, on peut légitimement penser que la mort est sinon créée par Dieu, du moins acceptée par lui comme une conséquence de la Création. La mort physique touche tous les êtres ; le Fils de Dieu fait homme n’y a pas lui-même échappé.

Dieu n’a peut-être pas créé la mort, mais il la permet.

Mais, encore une fois, est-ce de la mort physique dont parle la Sagesse ? N’est-ce pas plutôt de la mort spirituelle, c’est-à-dire du refus absolu de Dieu par l’homme ? Car la raison donnée est une indiction spirituelle mais pas une explication scientifique : « C’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde. »

 Le fait d’évoquer la mort spirituelle n’est pas une méconnaissance ou un mépris de la souffrance et de la mort physique. Jésus en donne deux preuves : la guérison de la femme et la résurrection de la fillette.

Jésus n’a pas guéri de son temps toutes les femmes malades, il n’a pas ressuscité tous les enfants morts. Ces deux actions sont des signes de ce qu’il est venu faire dans l’humanité : nous donner à tous l’incorruptibilité en nous rendant semblables à lui.

Car Jésus, comme son Père, ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants, que ce soit de mort physique et, plus encore, de mort spirituelle.

Mais la question que pose le livre de la Sagesse est quelque chose de ce genre :

  • = croyons-nous vraiment que notre Dieu aime la vie ?
  • = n’avons-nous pas tendance à le relier à la souffrance et à la mort plus qu’à la vie ?
  • = avons-nous compris que la sauvegarde de la vie terrestre sous toutes ses formes est un acte profondément spirituel, c’est à dire inspiré par l’Esprit Saint ?

La lutte contre la souffrance et la mort ne nous empêche pas de mourir physiquement, mais nous rend semblables à Dieu qui aime la vie.

La lutte contre la souffrance et la mort sous toutes ses formes et selon nos moyens nous prépare et nous ouvre à la vie d’amour définitive en vue de laquelle Dieu nous a créés.

C’est en ce sens qu’on peut dire avec l’auteur du livre de la sagesse que Dieu n’a pas fait la mort et qu’il nous a créés pour partager sa propre vie.

Vous savez que les évangiles ont été écrits après la Passion et la Résurrection. Les évangélistes ont cela en mémoire. Lorsqu’ils racontent que Jésus opère une guérison ou une résurrection, c’est, pour eux, comme un avant-goût de la résurrection du Seigneur : Jésus s’est relevé d’entre les morts pour nous en relever, nous aussi : « Jeune fille, je te le dis, lève-toi. Aussitôt, la jeune fille se leva et se mit à marcher. »

Peut-être est-ce la phrase que vous allez conserver ?

Que St Pierre-St Paul nous guident dans ce choix.

DES TRUCS POUR AIDER A PRIER PERSONNELLEMENT

Des « trucs » : les miens ; les autres prêtres en ont certainement d’autres. Et vous aussi. Ceux que je vais dire sont mes trucs « à moi ».

  • Il ne faut pas les prendre tous, mais l’un ou l’autre maintenant. Et dans quelque temps, un autre, puis un autre …
  • Ils sont là pour aider non pas à dire des prières – vous savez en dire aussi bien que moi – mais pour favoriser un état de prière. Car il ne suffit pas de dire des prières pour prier.

Les gestes

« Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit. »

A quelle vitesse avons-nous dit ce signe de croix ?

Pourquoi le dire vite ?

Pas de théâtralisation, mais le dire comme une prière et non pas comme une simple introduction à la prière.

Nos gestes sont-ils beaux ?

Comment communier ? Difficile en ce moment avec le masque. Mais on peut peut-être améliorer le geste et non pas manger dans sa main, ce qu’on ne fait probablement pas chez soi.

Le corps

Etre bien assis, ou bien debout, ou bien à genoux.

L’attitude du corps est une prière : se présenter correctement devant le Seigneur. Alors évidemment on fait ce qu’on peut avec le corps qu’on a !

A genoux : mettre un coussin sous ses genoux pour penser à la prière et pas à ses genoux (St Thomas d’Aquin)

Assis : mettre son corps en silence (dans la mesure du possible quand on a mal quelque part).

Le silence

  • Après le signe de croix, prendre un court passage d’évangile (celui du jour ou du dimanche précédent …) : laisser la parole au Seigneur avant de parler. Le Notre Père est fait de deux parties : 1ère partie pour le Seigneur (le nom, le règne, la volonté) ; 2ème partie : pour nous.
  • Mettre du silence par notre corps (on vient de le voir) ; mettre du calme et du silence dans notre élocution.

Les distractions

Au moins deux sortes de distractions :

  • Celles qui nous viennent de nous.

= ou bien je les entretiens

= ou bien je les offre : Seigneur je viens de penser qu’il faut que j’achète du pain pour le dîner, je t’offre cette pensée POUR PENSER A TOI !

Je me sers de cette distraction pour me tourner vers le Seigneur.

  • Celles qui me viennent du Seigneur : une personne pour qui prier, une action de grâce, une demande de pardon …

Le temps et les moments

  • Utiliser les temps perdus : dans le métro ou le bus
  • Utiliser les événements de la journée : avant ou après un coup de fil, en préparation d’une rencontre ou d’un travail (un simple : « Seigneur, je te confie ce temps. »)
  • Le minutage : décider d’un temps précis / le tenir jusqu’au bout, même dans la sécheresse.
  • Le matin : signe de croix tout de suite en se levant
  • Le soir :

Mauvaise succession : repas / toilette / lecture / prière (on s’endort dessus)

Meilleure succession : repas / toilette / prière / lecture / signe de croix

  • Les grands temps de prière : peut-être une fois par semaine / une retraite par an
  • Attention aux vacances !

NB :

Le dimanche

  • Un ou deux jours avant : lire les textes bibliques. Si on a le temps, les annoter.
  • Préparer une (ou deux) intention qu’on dira, mentalement, au moment de la Prière universelle
  • Aider les enfants à faire la même chose.
  • Proposer à un voisin handicapé, un ami solitaire … de l’emmener à la messe. Proposer à son enfant de faire de même pour un de ses amis.
  • Prévoir de porter la communion, après la messe, à quelqu’un qui ne peut se déplacer.

 

 

Père Jean-Paul

Homelie du 4e dimanche de Paques

25 avril 2021   4ème dimanche de Pâques   Année B

Actes 4,8-12     Ps 117(118)     1 Jn 3,1-2     Jn 10,11-18

Par le Père Jean Paul Cazes


Grâce à l’évangile d’aujourd’hui, celui du Bon Pasteur, l’Eglise entière prie pour les vocations. Toutes les vocations, bien sûr, mais, plus particulièrement pour les vocations sacerdotales.

            Une fois n’est pas coutume, j’ai envie de donner un titre à mon homélie.

Voici ce titre : « Du bon usage des prêtres. »

 

            Nous allons offrir cette messe pour demander au Seigneur de nouvelles vocations sacerdotales. Toutes les paroisses du monde entier vont prier à la même intention au même moment. Et cela, nous le faisons depuis des années et des années. Mais ça n’a pas l’air de changer grand-chose ! Cette année, dans notre diocèse, il y aura deux ordinations, dont celle de Thibaud, et c’est vraiment une belle joie. J’ai entendu dire qu’à Paris, il y aura douze ordinations. J’ai envie de dire ce que les Apôtres ont dit au sujet des cinq pains et des deux poissons pour 5000 hommes : « Qu’est-ce que cela pour tant de monde ? » Effectivement, si la joie est grande d’accueillir ces nouveaux prêtres, leur nombre ne compense pas celui des départs à la retraite et des décès. Pourquoi notre prière semble-telle si peu efficace ? Pourquoi notre Père, qui voit les besoins de l’Eglise de son Fils, semble-t-il sourd et muet ? Nous prions et demandons beaucoup ; mais est-ce la bonne demande ?

            Au chapitre 9 de l’évangile selon st Matthieu, Jésus dit à ses disciples : « La moisson est abondante, mais les ouvriers peu nombreux ; priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson. » (Mt 9,37-38) Jésus lui-même nous demande de prier le Père, ce qui veut dire que, dès les premiers moments de la vie de l’Eglise, les ouvriers étaient trop peu nombreux : à ce point de vue, la situation est donc semblable aujourd’hui. De plus, si on lit bien ce verset, on peut en tirer une bonne conséquence : la moisson sera toujours plus importante que le nombre des ouvriers. La moisson sera heureusement toujours plus abondante que le nombre des ouvriers. Imaginez la situation inverse : ce serait catastrophique. Trop d’ouvriers pour une moisson squelettique ! Alors, heureusement, la moisson est plus abondante que le nombre d’ouvriers et le sera toujours. C’était le cas hier, c’est le cas aujourd’hui et ce sera le cas demain. Et cette situation est d’abord un motif d’action de grâce avant d’être un motif de lamentation. Oui, merci Seigneur de nous donner une moisson abondante : il y a tant de choses à faire, tant d’évangélisation à entreprendre, ne serait-ce que dans nos quartiers, dans nos propres familles…

 

            C’est là où le titre de mon homélie trouve sa justification : « Du bon usage des prêtres. » Sur 50 ans de ministère actif, je fus curé durant 25 ans, responsable de communautés à Neuilly, à Rueil, à Vaucresson et Marnes. J’ai essayé de remplir honnêtement ma charge. Mais ma vocation n’était pas d’être curé. Ma vocation était – et est toujours – d’être prêtre. En tant que curé, il m’a fallu faire beaucoup de choses qui ne relevaient pas de ma compétence sacerdotale. Heureusement, j’ai toujours trouvé, auprès de moi, des collaboratrices et des collaborateurs efficaces. Pendant mes 25 ans de curé, la seule année où j’ai vraiment vécu ma vie sacerdotale sans qu’elle soit alourdie d’éléments secondaires, fut mon année à l’Arche, au milieu de personnes souffrant de handicap. Pendant un an – un an de bonheur – j’ai été prêtre sans être curé. L’Arche m’a utilisé – si je puis dire – comme prêtre et pas comme curé.

            Je transpose et je généralise cette expérience : j’ai le sentiment que les communautés paroissiales dans leur ensemble, du moins en France, n’ont jamais appris à bien utiliser leurs prêtres. Elles gardent les prêtres pour elles et pour la célébration des sacrements, la messe en particulier.

            Elles gardent les prêtres pour elles. Or Jésus nous dit aujourd’hui : « J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas dans cet enclos : celles-là aussi il faut que je les conduise. »Je me souviens du Père Raymond Vankersbielck qui a longtemps vécu ici-même. C’était une force de la nature. Il passait une partie de ses nuits au milieu des jeunes de la rue. C’était du temps qu’il ne donnait pas à la paroisse, et pourtant, du temps vraiment utile pour la mission. Les paroisses accepteraient-elles aujourd’hui de grand cœur que leurs prêtres passent une bonne partie de leur temps sur les périphéries, comme dit le Pape François ?

            Les paroisses gardent leurs prêtres pour la célébration des sacrements, mais pas beaucoup pour la formation. Or – pardon de le dire sans nuance – une messe sans formation de la foi n’aide pas à vivre en chrétien-missionnaire dans le monde. Jésus a formé ses disciples durant trois ans avant de les envoyer porter la Bonne Nouvelle dans le monde.

            Pendant mes 25 ans de responsabilité curiale, j’ai fait beaucoup d’administratif et pas beaucoup de direction spirituelle. Or il me semble que les prêtres sont plus ordonnés pour guider spirituellement que pour remplir des papiers ou surveiller les ouvriers qui repeignent le presbytère. Beaucoup de chrétiens ont recours aux psychologues, et c’est une bonne chose ; mais les consultations spirituelles, pour parler ainsi, sont ignorées, délaissées, ce qui est dommage.

 

            En souriant – car il faut savoir sourire des choses graves – j’estime que cette journée de prière devrait servir non pour demander de nouveaux prêtres, mais pour que le St Esprit apprenne aux communautés chrétiennes à mieux se servir des prêtres qu’elles ont déjà.

Liens entre PRIERE et MISSION

avril 2021   St Pierre-St Paul de Courbevoie

par le Père Jean Paul

Eglise et mission

Quelques sens du mot mission

En Christ, prière et mission

La mission a besoin de la prière

La prière chrétienne est missionnaire parce que chrétienne

Dimanche prochain, mon sujet sera toujours la prière, mais sous un aspect très pratique : le temps, les distractions, la place du corps, etc.

Aujourd’hui, dans la suite de ce qui été dit les dimanches précédents , je souhaite évoquer le lien entre la prière et la mission. Ce sera le dernier entretien de ce type.

Je précise tout de suite que si j’aborde le lien entre prière et mission maintenant, ce n’est pas parce que la mission viendrait une fois qu’on aurait pu mettre en œuvre tout ce qui vous a déjà été dit. La mission vient maintenant parce qu’on ne peut tout dire en même temps. Mais le sujet d’aujourd’hui aurait pu être abordé tout autant lors du premier entretien, ou du second ; il aurait pu être abordé tout le temps car la mission n’est pas un sujet à part, mais un élément de foi qui colore tous autres éléments de la vie de l’Eglise. Et qui colore la prière, en particulier. Nous essaierons donc de voir que la mission ne peut se passer de la prière, et que la prière, en elle-même, a une couleur missionnaire.

Eglise et mission

Peut-être, d’ailleurs, faut-il que nous nous entendions, même rapidement, sur ce qu’est l’Eglise et sur sa fonction. On peut dire que l’Eglise est le peuple des baptisés, le corps du Christ, le temple de l’Esprit saint. Gardons, par commodité, la première expression : l’Eglise, le peuple des baptisés.  Mais, de cette affirmation exacte, on en tire souvent la pensée que notre Père rassemble les baptisés pour les tirer du monde et les sauver ainsi. Ce n’est pas ce que dit Jésus dans la dernière grande prière qu’il adresse au Père : « Je ne te demande pas de les ôter ( = mes disciples) du monde, mais de les garder du Mauvais…Comme tu m’as envoyé dans le monde, je les envoie dans le monde. » (Jean 17, 16+18) L’Eglise n’est pas le peuple de ceux qui sont sortis du monde comme on sort de l’eau quelqu’un qui se noie. L’Eglise est le peuple de ceux qui sont liés au Christ, marqués par l’Esprit, pour aller dire au monde le salut offert à tous les hommes. Là est le rôle de l’Eglise peuple de Dieu, corps du Christ, temple de l’Esprit : annoncer le salut offert universellement par le mystère pascal. Les baptisés ne sont pas regroupés pour se protéger mutuellement du monde mais s’aider mutuellement à annoncer le Christ. C’est ce que nous entendons aujourd’hui même dans l’évangile : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. » (Jean 20, 21) En st Mathieu on lit dans les derniers versets du dernier chapitre : « Allez donc : de toutes les nations faites des disciples … » (Mt 28,19) De même en st Marc : « Allez par le monde entier, proclamez l’Evangile à toutes les créatures. » (Mc 16,15) Et en st Luc : « …on prêchera (en mon nom) la conversion et le pardon des péchés à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. C’est vous qui en êtes témoins. » (Lc24,47-48)

L’Eglise n’est pas le club de ceux qui ont peur du monde et qui cherchent à s’en protéger. Elle est le peuple des témoins du mystère pascal offert à tous les hommes, de toutes les races et de toutes les nations. L’Eglise est faite pour annoncer l’Evangile du salut. Comme dirait le Pape, elle n’est pas une ONG supplémentaire, même si, dans son travail d’évangélisation, elle prend soin de la santé, de l’éducation, de la justice, de la paix… Car son annonce de l’Evangile n’est pas une annonce désincarnée.

L’Eglise est envoyée au monde pour lui annoncer l’Evangile. Elle est faite pour cela, c’est son travail. Mais c’est son travail, parce que – fondamentalement – c’est le travail du Christ et de l’Esprit. Annoncer l’Evangile n’est le travail et la mission de l’Eglise que parce que c’est le travail et la mission du Christ et de l’Esprit. Ce travail, cette mission, l’Eglise les reçoit du Christ par la force de l’Esprit.

 

Quelques sens du mot « mission »

Essayons de préciser quelques-uns des sens du mot mission.

Il y a, bien sûr, ce qu’on peut appeler les missions lointaines. Au siècle dernier, elles ont connu un grand essor en Afrique et en Asie. Et elles ne sont pas terminées : tant de contrées, tant de peuples ignorent encore le Christ !

Il y a aussi les missions de proximité. Par exemple : les catéchistes au service des enfants et des jeunes, les mamans qui apprennent le signe de croix à leurs petits Et tous ces gestes qui ne disent pas forcément le Christ à haute voix, mais qui disent quelque chose de son amour et de son attention pour les hommes à travers les relations de travail, les liens amicaux et familiaux

Toutes ces formes de la mission, et d’autres encore, reposent sur la certitude que le Christ est venu pour tous les hommes de tous les temps et de toutes les cultures. Si nous pensons que le Christ est un leader religieux parmi les autres, plus grand peut-être, mais au milieu des autres, alors la mission n’est pas nécessaire. Mais si nous pensons que le Christ est venu offrir quelque chose d’indispensable à l’humanité, la mission alors coule de source. Il ne s’agit pas de prosélytisme : il s’agit de proposer à tous les hommes – au moins à ceux que nous côtoyons- ce que nous croyons leur être indispensable, autant pour eux que pour nous.

 

En Christ, prière et mission

Mais si nous pensons la mission indispensable, ce n’est pas parce que nous sommes les plus généreux des hommes : c’est parce que nous la recevons de Dieu. Et nous la recevons dans la prière. Même très rapidement, regardons Jésus.

Mc 1, 35-38 : « Au matin, à la nuit noire, Jésus se leva, sortit et s’en alla dans un lieu désert ; là il priait. Simon se mit à sa recherche, ainsi que ses compagnons, et ils le trouvèrent. Ils lui disent : « Tout le monde te cherche. » Et il leur dit : « Allons ailleurs, dans les bourgs voisins, pour que j’y proclame aussi l’Evangile : car c’est pour cela que je suis sorti. »

On voit bien ici le lien entre la prière et la mission. Ces deux éléments s’enchaînent logiquement : dans la prière, Jésus, le Fils unique, se relie vitalement à son Père qui l’envoie pour annoncer l’Evangile. Jésus est sorti non pas tant de la maison de Capharnaüm que du Père : il est l’Envoyé du Père pour annoncer aux hommes l’Evangile du salut.

Grâce à ces quelques versets, on perçoit le lien entre prière et mission.

Souvent, on pense que la vie missionnaire est une réalité, et la vie de prière une autre réalité. On connaît des missionnaires, on connaît des moines, et on a tendance à séparer les deux styles de vie. Il convient évidemment de distinguer la vie missionnaire et la vie d’un couvent ; mais distinguer n’est pas opposer. Chaque partie de la vie de l’Eglise a besoin des autres ; l’Eglise est un corps dont tous les membres, pour différents qu’ils soient, se complètent et s’entraident.  Derrière l’opposition que nous voyons spontanément entre vie missionnaire et vie au couvent, nous sentons poindre la vieille opposition entre action et méditation. Or, on ne peut les opposer l’une l’autre sans les détruire, comme on ne peut opposer Marthe et Marie. Chacun de nous est un subtil assemblage de Marthe et de Marie, un précieux mélange d’action et de méditation.

De même pour prière et mission. D’ailleurs, vous connaissez certainement la sainte patronne universelle des Missions ? C’est Ste Thérèse de Lisieux qui n’a jamais quitté son Carmel !

 

La mission a besoin de la prière

Il me semble – je me trompe peut-être – qu’on accepte assez volontiers l’idée que la mission a besoin de la prière.

La mission, qu’elle soit lointaine ou proche, a besoin de la prière pour trouver son origine : si j’annonce l’Evangile, ce n’est pas parce que je connais bien la doctrine catholique, que je sais bien parler et que j’ai fait des études. Si j’annonce l’Evangile, c’est parce que j’en reçois mission de la part du Seigneur. C’est ce qu’écrivait Paul aux chrétiens de Corinthe : « … Je ne le fais pas de moi-même, c’est une mission qui m’est confiée. » (1 Co 9,17)

Le missionnaire premier, fondamental, c’est le Christ ; c’est lui qui est l’Envoyé du Père ; c’est lui qui, à son tour nous envoie : « Comme tu m’as envoyé dans le monde, je les envoie dans le monde. » (Jn 17,18). Si le Christ renouvelle ses forces dans la prière, combien plus, nous aussi, devons-nous renouveler nos forces pour répondre au fait que Jésus nous envoie à sa suite pour annoncer l’Evangile.

La mission a besoin de la prière : elle a besoin d’être accompagnée à travers ses échecs, ses hésitations, ses succès.

La mission a besoin de la prière pour intercéder en faveur de celles et de ceux pour qui est menée la mission, tout autant qu’en faveur des missionnaires eux-mêmes.

La mission a besoin de la prière pour que les missionnaires, qui se sont donnés corps et âme à leur mission, soient capables de s’en détacher le moment venu, laissant à Dieu le champ libre ; la mission n’appartient pas aux missionnaires, ce sont les missionnaires qui appartiennent à Dieu.

Ces liens entre mission et prière que je viens seulement d’évoquer, je pense que nous les concevons assez facilement.

 

La prière chrétienne est missionnaire parce que chrétienne

Mais ce qui nous est peut-être moins aisé est de voir la portée missionnaire de la prière. Je veux dire : la composante missionnaire de la prière. Non pas seulement le fait que la prière aide et accompagne la mission, mais le fait que la prière, en elle-même, est missionnaire ou elle n’est pas.

Quand je parle de prière, c’est de la prière chrétienne que je parle. Prier est le fait de tout homme croyant ; prier n’est pas une caractéristique propre au christianisme. Mais la prière chrétienne, la prière à la suite et à l’imitation de la prière du Christ, possède ses caractéristiques propres. La prière chrétienne est animée par l’Esprit de Jésus qui nous tourne vers son Père. La prière chrétienne trouve sa source dans le mystère pascal du Christ qui est notre Grand Prêtre. Le Christ nous tourne, dans notre action comme dans notre prière, vers le Père et vers le prochain. Le double commandement du Christ est le fondement de notre action missionnaire et de notre prière. Encore une fois, on ne peut séparer Marthe et Marie, comme on ne peut séparer l’amour pour Dieu et l’amour pour les hommes !

L’action missionnaire – que ce soit celle du missionnaire en Chine, ou celle de la maman qui apprend à prier à son enfant – ne peut être mission pour Dieu que si elle est mission reçue de Dieu et orientée vers Dieu à chaque instant de son développement. La mission chrétienne ne peut être vécue sans la prière qui la réfère constamment à sa source, la relie au Christ mort et ressuscité et lui donne les forces de l’Esprit.

Disons, pour faire court, que la mission chrétienne est pétrie de prière.

Peut-on dire de la prière chrétienne qu’elle est missionnaire dans le sens où je viens d’essayer de le préciser ?

 

Regardons un instant la prière que nous connaissons le mieux : le Notre Père. Et considérons particulièrement ces deux premiers mots. J’imagine que, dans votre prière personnelle, il vous arrive de dire « Mon Dieu ». Cela m’arrive aussi, soyez tranquilles. Or, en rigueur de terme, ce n’est pas ainsi que nous devrions parler. Mardi dernier, lors de la messe du jour, la liturgie nous a donné à lire la merveilleuse apparition du Ressuscité à Marie-Madeleine. Comme elle voulait le retenir, ce qui se comprend, Jésus lui dit : « Ne me retiens pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Va trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu »(Jn 20, 17) En rigueur de terme, seul le Christ a le droit de dire MON Dieu, MON Père. Il est Fils de Dieu unique par nature alors que nous sommes fils et filles de Dieu multiples par adoption. Il est le Premier né, nous sommes tous les cadets pour ainsi dire. Lui, par sa nature, il peut dire MON car il est le seul homme à posséder la nature divine. Nous, les baptisés, nous les fils et les filles de Dieu non par nature mais par grâce, nous pouvons comme le Christ dire Père au Père, mais nous le disons ensemble. Encore une fois, nous pouvons dire Dieu, nous pouvons dire Père, comme le Christ et avec lui ; mais, encore une fois, en rigueur de terme, nous devrions toujours dire NOTRE Dieu, NOTRE Père. Lorsque nous prions, même au fin fond de notre chambre, notre prière est toujours communautaire. Notre prière nous relie au Christ qui prie, et à tous les baptisés.

Regardons maintenant la messe. Par excellence, elle est l’acte de prière de tous ceux qui croient et adorent le Christ. Et si chacun d’entre nous reçoit le corps sacramentel du Christ, c’est pour que, tous ensemble, nous devenions le corps du Christ qu’est l’Eglise. Comme le dit une prière de la messe et un chant, en communiant, nous devenons ce que nous recevons ;nous devenons le Corps ecclésial du Christ en recevant son Corps sacramentel. Or, la fin de la messe est un envoi en mission : « Allez, dans la paix du Christ ! »Nous allons à la messe non pour y rester mais pour partir et annoncer ce que nous venons de vivre : le mystère pascal.

Au cours de la messe, à la jonction entre la fin de la liturgie de la Parole et le début de la Prière eucharistique, se trouve la Prière universelle que Paul VI et le Concile ont restaurée pour chaque messe dominicale. Il est toujours malaisé de rédiger une Prière universelle dimanche après dimanche. Pourtant, c’est simple ; elle a trois axes : la prière pour le monde, la prière pour l’Eglise, la prière pour la communauté locale. Ces trois axes peuvent être développés en plusieurs intentions. Ce qu’il faut souligner ici c’est ceci : au cœur de la messe, après avoir entendu les lectures bibliques, après avoir réaffirmé sa foi, le peuple de Dieu prie aux intentions du monde juste avant d’offrir le pain et le vin qui deviendront Corps et Sang du Christ, « versé pour (nous) et pour la multitude. » Les paroles de la consécration sont ouvertes au monde : la mission d’évangéliser le monde jaillit du côté transpercé du Christ avec le sang et l’eau. « Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. » (Mt 28, 19-20)

 

Pour clore cet exposé trop rapide et trop succinct, je ne peux mieux faire qu’en rappelant quelques-uns des versets de st Jean qui me semblent ici particulièrement à leur place dans ces rapports entre la prière et la mission : « Dieu … a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde mais pour que le monde soit sauvé par lui. » (Jn 3, 16-17)

 

 

 

Semaine Sainte

Dimanche des Rameaux

Dimanche 28 mars

Avec bénédiction du buis sur le parvis
Messe : Samedi à 16h30 – Dimanche à 9h, 11h et 16h30 Rencontre des équipes de Carême autour de «Nous habitons tous
la même maison » de 14h à 16h dans l’église

Jeudi Saint

Jeudi 1 avril

Office des ténèbres à 8h30 Confessions de 14h à 15h30
Messe en mémoire de la Cène du Seigneur à 16h

Vendredi Saint

Vendredi 2 avril

Office des ténèbres à 8h30 Confessions de 13h à 15h Chemin de Croix à 15h Célébration de la Passion à 16h

Samedi Saint

Samedi 3 avril

Office des ténèbres à 8h30 Confessions de 13h à 15h
Vigile pascale avec baptêmes d’adultes à 16h

Dimanche de Pâques

Dimanche 4 avril

Messes à 9h, 11h et 16h30

Homélie du 14 février 2021 6e dimanche ordinaire

Lv 13,1-2+45-46     Ps 31     1 Co 10,31-11,1     Mc 1,40-45

 

 

Dimanche dernier, nous avons laissé l’évangile sur ce dernier verset : « Et (Jésus) parcourut toute la Galilée, proclamant l’Evangile dans leurs synagogues, et expulsant les démons. »  

C’est pour proclamer la Bonne Nouvelle que Jésus est sorti, comme il le dit lui-même. Il n’est pas seulement sorti de la maison de la belle-mère de Pierre ; il est sorti du Père pour venir chez nous annoncer l’Evangile.

Après ce verset, on s’attendrait à un discours. Or, la première chose que St Marc rapporte, ce n’est pas un discours de Jésus, ce n’est pas un enseignement en paroles, mais un enseignement en acte. Ce que St Marc raconte, c’est la guérison d’un lépreux. La Bonne Nouvelle, c’est que Dieu, en la personne de Jésus, s’est laissé toucher par un lépreux.

Vous savez ce que représente la lèpre pour les temps bibliques. Comme pour nous, c’est une maladie très contagieuse ; voilà pourquoi le malade doit se tenir à l’écart ; il n’a pas même le droit d’entrer dans les villages ; il doit signaler sa présence en agitant une crécelle ; les gens charitables lui laissent à manger en disposant de la nourriture à la limite des habitations. Mais, bien plus que cela, la lèpre exclue le malade de la communauté des croyants. Non seulement il ne peut plus entrer dans les synagogues, puisqu’il ne peut entrer dans les villages, mais il ne peut plus monter au Temple de Jérusalem pour les grandes fêtes juives. Le lépreux est non seulement exclu de la société civile, mais de la société religieuse. En ce temps-là, le civil et le religieux ne sont ni séparés ni séparables. L’un entraîne l’autre. L’exclusion du lépreux est une exclusion totale. Personne n’a le droit de le fréquenter, ni même de le toucher. Car le contact physique entraîne non seulement le risque de la contagion, mais rend celui qui touche aussi impur que celui qui est touché.

Le lépreux est un intouchable.

 

Jésus est donc sorti pour proclamer l’Evangile. Et la première Bonne Nouvelle que rapporte st Marc est le geste étonnant de Jésus : il touche le lépreux. Pour Dieu, en la personne de Jésus, aucun homme n’est intouchable. Pour Dieu, en la personne de Jésus, toute impureté, soit de corps, soit de cœur, est guérissable pour peu que le pécheur, dise, à sa manière : « Seigneur, si tu le veux, tu peux me guérir. »

La Bonne Nouvelle pour laquelle Jésus est sorti du Père est la nouvelle de notre guérison. Nous sommes des malades guérissables. Nous sommes des pécheurs pardonnables. Qui que nous soyons. Quel que soit notre péché. Voilà la Bonne Nouvelle à recevoir à l’aube du Carême.

Pour Dieu, en Jésus, aucun homme n’est intouchable.

 

De cela, on peut tirer plusieurs conséquences.

La première, c’est que Dieu, en Jésus, ne nous guérit pas, ne nous pardonne pas du haut de son ciel, comme Louis XIV du haut de son trône. Il vient chez nous, il vient jusqu’à nous ; il prend sur lui ce qui nous rend malades. Il se charge de nos maladies spirituelles. Il réalise ces paroles du prophète Isaïe que nous entendrons encore une fois lors du Vendredi saint : « En fait, c’étaient nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était frappé. »

La seconde conséquence, c’est qu’aucun de nos péchés n’est impardonnable, qu’il soit petit ou grand. Souvent, nous nous jugeons nous-mêmes impardonnables, et nous n’osons pas nous approcher du sacrement du pardon. Il m’est arrivé, une fois, d’entendre une personne me dire que son péché était si gros que Dieu ne pouvait le lui pardonner. C’est elle qui se jugeait, c’est elle qui se condamnait. Jésus ne condamne personne : il est sorti pour nous annoncer la folie de son amour et donc la réalité de son pardon. A ses yeux, aucun péché n’est impardonnable ; il suffit que nous tombions à ses genoux en lui disant : « Si tu le veux, tu peux me purifier. » Dieu, en Jésus, s’est laissé toucher par nos misères, et c’est pourquoi il nous touche à son tour pour prendre sur lui ce qui nous défigure.

La troisième conséquence est que, si pour Jésus, tout homme est fréquentable, si pour Jésus personne n’est intouchable, il serait bon d’utiliser le temps du Carême pour apprendre à regarder autrui comme il nous regarde. Dans notre seconde lecture, St Paul écrit : « Imitez-moi comme moi aussi j’imite le Christ. »  Pour le Christ, personne n’est intouchable. Comment l’imiter, comment nous inspirer de lui ? Peut-être déjà – et cela vaut pour chacun de nous– en prenant conscience de toutes les personnes qui sont à nos yeux intouchables, infréquentables. De toutes celles à qui il nous est si difficile d’accorder notre pardon. Le Carême ne serait-il pas le moment de réouvrir tous ces dossiers et de réexaminer la question ?

 

Seigneur Jésus, il nous est aussi dur d’accorder le pardon que de le demander. Toi qui t’es laissé toucher par nos misères, accorde-nous de nous laisser toucher par toi et, à notre tour, de toucher nos frères à cause de toi.

 

Homélie du 7 février 5e dimanche du temps ordinaire

Jb 7, 1-4+6-7     Ps 146     1 Co 9, 16-19+22-23     Mc 1,29-39

Par le Père Jean Paul Cazes

A lire et relire la première lecture et l’évangile de ce jour, comment ne pas nous y reconnaître ? Les questions de santé nous ont toujours touché, à tel point que la formule spontanée des vœux que nous venons à peine d’échanger est « Bonne année, bonne santé ».

Les questions de santé sont en ce moment omniprésentes, à tel point que les informations à la radio ou à la télé ne parlent presque que de cela, comme si le reste du monde avait disparu. A part les élections américaines, nous ne savons plus guère ce qui se passe en Syrie, en Afghanistan ou en Birmanie. On nous parle de la fabrication des vaccins en Chine, mais on ne nous dit presque plus rien sur la situation à Hong Kong. On sait que Spoutnik V est un vaccin sûr, mais on ne sait plus trop où en sont les droits de l’homme en Russie.

Les problèmes de santé nous tracassent, plus peut-être aujourd’hui qu’à un autre moment. A cause des détresses qui sont les nôtres, nous nous tournons vers Jésus. C’est un réflexe normal.

La question que je me pose, quand même, est de savoir si notre piété sera la même une fois que nous serons sortis de la pandémie. Pour le dire plus crûment, et de façon un peu provocatrice : est-ce que nous utilisons bien Jésus ? Est-ce que nous l’utilisons pour ce pour quoi il est fait ? Pour prendre des images : nous n’utilisons pas une aiguille à broder pour coudre du cuir ; nous n’utilisons pas un marteau pour souder ; nous ne jouons pas au rugby avec une balle de tennis.

 

Certes, Jésus affirme avec force qu’il se fait notre serviteur ; il dit lui-même être «venu non pour être servi mais pour servir. » (Mt 20,28) Et il lave les pieds de ses disciples.

D’autre part, Jésus nous incite à demander. Demander des grâces au Seigneur, c’est reconnaître que nous ne pouvons rien sans Lui. C’est reconnaître qu’il est comme un Père à notre égard et qu’il prend soin de nous parce qu’il nous aime. « Demandez, on vous donnera …frappez, et on vous ouvrira. » (Mt 7,7) La prière de demande est une des formes de la prière que Jésus nous recommande. Par exemple, la seconde moitié du Notre Père est faite de prières de demande : Donne-nous aujourd’hui … Pardonne-nous … ne nous laisse pas entrer en tentation … délivre-nous du mal. Ce serait mal connaître le cœur du Père que de ne pas lui adresser toutes nos demandes.

 

Faisons le point : Jésus, qui s’est fait notre Serviteur, nous encourage à demander. Or, en ce moment, les questions de santé sont omniprésentes. Il est donc normal de les lui présenter, il est donc normal de lui dire nos détresses de santé, et toutes les détresses qui en découlent.

 

Cependant, je me demande si utilisons bien Jésus, comme il souhaite être utilisé. Encore une fois, je m’exprime de manière un peu provocante.

Pour illustrer ma question, examinons les intentions de prière qui sont demandées à chaque messe.  Il y a beaucoup de demandes – et c’est normal. Par contre, il y a peu de remerciements et d’actions de grâce. En bonne logique, il conviendrait qu’il y ait au moins autant de remerciements que de demandes.

Encore une fois, il est juste de présenter au Seigneur nos questions, nos problèmes, nos détresses. En particulier dans le domaine de la santé. Mais Jésus est-il venu pour être notre docteur-miracle ? Jésus est-il notre super-vaccin ?

De son temps, il a guéri des malades : l’évangile de ce jour en est témoin. Mais il n’a pas guéri tous les malades de son époque. Il a ressuscité Lazare, mais il n’a pas ressuscité tous ceux qui étaient morts à son époque. Il a pacifié ceux qui étaient habités par des esprits impurs ; mais pas tous.

Ce qui me fait dire : avons-nous bien compris et admis ce qu’il est vraiment venu faire au milieu de nous, ou bien sommes-nous uniquement en train d’utiliser sa puissance à notre service ? Ne sommes-nous pas comme ces juifs qui, après la multiplication des pains, voulaient que Jésus devienne leur roi ? (Jn 6, 14-15) C’est si pratique d’avoir un  roi qui donne à manger. C’est si pratique d’avoir un Seigneur qui guérit tout le monde.

Lorsque Simon le cherche et le trouve en train de prier, Jésus lui répond : « Allonsailleurs, dans les villages voisins, afin que là aussi je proclame l’Evangile : car c’est pour cela que je suis sorti. » Certes, de grand matin, il est sorti de la maison pour aller prier. Mais ce n’est pas de cette sortie-là qu’il veut parler. Il est sorti de son Père, il est venu jusqu’à nous. Et pourquoi ? Pour proclamer l’Evangile. Voilà sa mission. Il n’est pas venu pour être le docteur universel et guérir toutes les maladies physiques. Les quelques guérisons physiques et psychiques qu’il a accomplies de son temps, les quelques guérisons physiques et psychiques qu’il accompli du nôtre, sont les signes d’une autre guérison infiniment plus profonde et plus universelle qu’il est venu offrir à tous : la guérison de tout être et de l’être tout entier, la possibilité enfin réalisée d’être unis à notre Père et rassemblés dans un même peuple de frères et de sœurs. C’est ce qu’on appelle le salut.

Jésus s’est fait notre Serviteur par amour pour nous permettre d’accéder, grâce à lui, à notre Père. Son outil : la prédication de l’Evangile. St Paul l’a parfaitement compris, lui qui écrit aux chrétiens de Corinthe dans notre seconde lecture: « Frères, annoncer l’Evangile … c’est une nécessité qui s’impose à moi. »

 

Il est normal de demander au Seigneur Jésus de nous aider dans nos détresses, et spécialement en ce qui concerne notre santé et celle de nos proches. Mais Jésus est venu nous offrir, par sa mort et sa résurrection, une toute autre guérison dont les guérisons physiques en sont le signe. Savons-nous demander la guérison du corps sans oublier celle de notre être entier ? Savons-nous autant remercier que demander ?

 

En résumé, savons-nous regarder Jésus et le prier pour ce qu’il est venu faire chez nous, c’est-à-dire : apporter l’Evangile du salut ?