Homélie du 6 novembre 2022   32ème dimanche ordinaire  C

1M 7,1-2+9-14     Ps 16     2Th 2,16 – 3,5     Lc 20,27-38

Par le pere Jean Paul Cazes

Au fait, qu’est-ce que c’est que la résurrection ? Quels mots utiliser pour en parler ? Comment se la représenter ? Comment la comprendre ? Quelle importance peut-elle avoir pour notre vie chrétienne ? Certes, St Paul écrit aux Corinthiens : « Si Christ n’est pas ressuscité notre prédication est vide et vide aussi notre foi. » (1 Co 15,14). La résurrection du Christ est donc le pivot de notre foi chrétienne. Mais, une fois qu’on a dit cela, que dire d’elle ? Je comprends les interrogations des apôtres. St Marc écrit en conclusion de la Transfiguration : « (Jésus) leur recommanda de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, jusqu’à ce que le Fils de l’homme ressuscite d’entre les morts. Ils observèrent cet ordre, tout en se demandant entre eux ce qu’il entendait par « ressusciter d’entre les morts » (Mc 9,9-10) Il n’est donc pas étonnant que des sadducéens viennent interroger Jésus sur ce sujet.

Au temps de Jésus, il y avait plusieurs mouvements spirituels parmi les juifs. Les deux les plus importants étaient les pharisiens et les sadducéens. Pour faire bref, les pharisiens croyaient à la résurrection, les sadducéens n’y croyaientpas : c’est ce que l’évangile du jour précise. Souvent, pharisiens et sadducéens s’approchent de Jésus pour lui tendre un piège ; aujourd’hui, Luc ne le précise pas. Il peut y avoir des sadducéens de bonne foi qui viennent interroger le Maître pour connaître sa pensée. Certes, ils lui posent un cas de conscience un peu curieux, mais qui prend place dans ces discussions que nous appelons rabbiniques, ces discussions qui nous semblent, à nous, tirées par les cheveux, mais qui dénotent chez les juifs l’extrême attention qu’ils portent à la parole de Dieu. D’ailleurs, c’est à partir d’une citation tirée du livre du Deutéronome qu’ils abordent Jésus : « Maître, Moïse nous a prescrit … » Et c’est sur ce même registre que Jésus va leur répondre lorsqu’il dit : « Que les morts ressuscitent, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent … » Ce récit se trouve dans le livre de l’Exode (Ex 3).

Nous sommes donc en face d’une de ces discussions dont les juifs pieux ont le secret, mais qu’il nous est honnêtement difficile de comprendre. Je ne me vois pas dire à quelqu’un qui m’interrogerait sur la résurrection : nous serons comme des anges. Sourions un peu : je ne dis pas que Jésus a tort, je dis que son argument, qui devait certainement toucher ses interlocuteurs, nous touchent peu, ou même pas du tout. Sa réponse soulève pour nous plus de questions qu’elle n’en résout. Pourtant, la résurrection est au cœur de notre foi. Comment en parler, et comment en rendre compte ? La foi chrétienne comprend évidemment une morale, mais elle est bien plus qu’une morale : elle est un attachement à une personne, la personne de Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, mort et ressuscité pour tous les hommes. Jésus est un sage, mais bien plus qu’un sage ; il est un prophète, mais bien plus qu’un prophète. Il donne un enseignement, mais bien plus qu’un enseignement : il se donne lui-même, lui, le ressuscité.

Mais ça ne résout pas notre problème. Comment parler de sa résurrection et de la nôtre ? Comment en rendre compte pour celui qui s’approche de la foi chrétienne ?

A lire et à relire ce passage, il me semble qu’une clef de compréhension se trouve dans la dernière phrase du Seigneur : « (Dieu) n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. » Comme exemple surprenant de grands vivants, il citeAbraham, Isaac et Jacob qui sont pourtant morts depuis des lustres ! Pour comprendre que la résurrection n’est pas une chose, ou un concept, il faut être vivant soi-même. Sommes-nous des vivants ? La question peut paraître étonnante, stupide même. Cependant, elle vaut le coup d’être posée. Sommes-nous effectivement des vivants ? Les difficultés de la vie ont-elles amoindri en nous le sens et le goût de la vie ? Je parle de la vraie vie, pas de la vie de pacotille. Je parle de ce que disait Dieu par la bouche de Moïse dans le Deutéronome : « c’est la vie et la mort que j’ai mises devant vous, c’est la bénédiction et la malédiction ; choisis donc la vie pour que tu vives, toi et ta descendance, en aimant le Seigneur ton Dieu, en écoutant sa voix et en t’attachant à lui. » (Dt 30, 19-20)

On ne comprend pas la résurrection après une longue conférence, ou un cours à l’Institut catholique, même si ça peut aider. On comprend la Vie (avec un grand V) si on est vivant soi-même. Si on lutte contre ce qui entraîne à l’injustice, au renfermement sur soi, à la vengeance, à la dépréciation des autres et de soi-même. Et si on aide, comme on peut, à la croissance, à la main tendue, au pardon. J’en veux pour signe ce que dit le père de la parabole de l’enfant prodigue : « mon fils était mort, et il est revenu à la vie. » (Lc 15,24)

Jésus n’a jamais donné de cours au sujet de la résurrection : il nous appelle à vivre de son Esprit. C’est ainsi que nous comprendrons de l’intérieur de nous-mêmes ce qu’est la résurrection, comme un nourrisson comprend la vie lorsqu’il tête sa mère : « Mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère » dit le psaume 130.

En ce moment, dans notre société, nous rencontrons un nombre incroyable de sollicitations qui nous tirent vers la mort. Saurons-nous, sans discours, mais par nos choix de vie, être témoins de Celui qui nous a dit : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. » ? (Jn 14, 6)

Homélie du 1er novembre 2022   TOUSSAINT

Ap 7,2-4+9-14     Ps 23(24)     1 Jn 3,1-3     Mt 5,1-12a

par le pere Jean Paul Cazes

Je lisais récemment un vieux livre du XVIIème siècle, écrit par St François de Sales, l’évêque de Genève. Son titre : « Introduction à la vie dévote. » Comme ça fait un peu vieillot, on peut le traduire par « Introduction à la vie spirituelle. » Dès le début, au chapitre trois, St François se heurte à l’objection selon laquelle la vie spirituelle serait uniquement réservée aux moines et aux religieuses. Alors il écrit : « C’est … une erreur … que de bannir la vie spirituelle de la vie des soldats, de la boutique des artisans, de la cour des princes, du foyer des époux. »

Si je cite St François de Sales, c’est qu’il est possible de dresser un parallèle entre ce qu’il dit de la vie spirituelle et ce qui peut être dit de la sainteté. Cette sainteté, on la réserve presque spontanément d’abord aux saints et aux saintes déjà canonisés qui sont, pour la plupart, des prêtres, des religieux, des religieuses …et ensuite à quelques laïcs égarés au milieu de cette multitude ! Or, le Concile Vatican II, dans un chapitre appelé « L’appel universel à la sainteté dans l’Eglise » écrit ceci qui ressemble beaucoup à ce qu’écrivait St François de Sales : « … l’appel à la plénitude de la vie chrétienne et à la perfection de la charité s’adresse à tous eux qui croient au Christ, quels que soient leur état ou leur rang. ».Le Concile n’exagère rien, il ne fait qu’actualiser ce que dit l’Apocalypse de St Jean : « Et j’entendis le nombre …ils étaient cent quarante-quatre mille de toutes les tribus des fils d’Israël. Après cela j’ai vu : et voici une foule immense que nul ne pouvait dénombrer … »

Quel que soit notre état de vie, nous sommes tous appelés à la sainteté. Mieux : c’est dans notre état de vie et par lui que nous sommes appelés à la sainteté, que nous soyons mariés ou non, ouvriers ou ingénieurs, infirmiers ou sages-femmes, patrons ou salariés, malades, prêtres ou religieuses, sportifs, étudiants, enfants et adultes... Je suis boulanger ? C’est par ma vie d’artisan que je peux marcher vers la sainteté. Je suis directeur des ressources humaines ? C’est là que le Seigneur m’appelle. Je suis mère de famille ?  Voilà mon chemin de sainteté…

D’abord, parce que nous sommes membres de l’Eglise qui est sainte. Nous l’affirmons dans le Credo. Certes, il faut un brin de culot pour parler de la sainteté de l’Eglise dans un moment où nous sommes tous blessés, salis par tant de scandales. Mais cette Eglise, constituée uniquement par les pécheurs que nous sommes tous, est sainte parce qu’elle est, fondamentalement, le Corps du Christ. C’est de ce Corps saint que nous sommes les membres ; nous sommes comme enveloppés par la sainteté du Dieu fait homme, lui qui a répandu sur l’humanité entière son Esprit de sainteté.

Dans cette Eglise sainte, nous avons été baptisés ; et je salue celles et ceux d’entre nous qui se préparent au baptême. Et parce que nous sommes baptisés et confirmés, nous avons reçu la dignité de fils et de filles de Dieu. C’est si grand, si incroyable même, que St Jean en est comme bouleversé lorsqu’il écrit – nous l’avons entendu dans notre seconde lecture : « Voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. »  Si nous sommes vraiment les enfants de Dieu par le baptême, alors nous portons le nom de notre Père qui est le Saint d’Israël, le Saint par excellence. Quand St Paul écrit aux chrétiens de Rome, il les nomme saints par l’appel de Dieu (Ro 1,7). Quand il écrit aux Corinthiens, il écrit « à l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe, ainsi qu’à tous les saints qui se trouvent dans l’Achaïe entière. » (2 Co 1,1) Quand il écrit aux chrétiens d’Ephèse, il dit : « Paul, apôtre de Jésus-Christ par la volonté de Dieu, aux saints et aux fidèles … » (Eph 1,1) Quand il écrit aux Philippiens, il dit : « Paul et Timothée, à tous les saints en Jésus-Christ qui sont à Philippes … » (Ph 1,1) Je pense qu’il n’est pas besoin de préciser que ceux à qui il écrit sont bien vivants ; et pourtant, il les appelle « saints » alors qu’ils sont aussi pécheurs que nous. S’il nous écrivait, il dirait : « Paul apôtre, aux saints qui vivent à Courbevoie. »

Mais l’objection arrive aussitôt, et c’est toujours la même, de Toussaint en Toussaint : nous ne sommes pas parfaits ; c’est exact. Mais il y a méprise entre sainteté et perfection. A part Jésus et Marie, aucun saint n’est parfait. Comme disait je ne sais plus qui, un saint est un pécheur pardonné. La sainteté et la perfection sont une vocation et un chemin, le perfectionnisme est une maladie. Je viens de lire un article qui montre que, selon une enquête de l’IPSOS, un français sur deux souffre de perfectionnisme de façon quotidienne, ce qui en fait l’une des causes les plus fréquentes de stress au travail et dans la vie courante. La conclusion de cette enquête recommande une pratique régulière d’un sport ou (je vous le donne en mille) ou de la méditation ! Extraordinaire IPSOS qui en arrive à la même conclusion de tant et tant de maîtres spirituels au long de l’histoire de l’Eglise : pour trouver la paix, pratiquer la méditation. Pour se défaire du perfectionnisme et rechercher la vraie perfection liée à la sainteté, accepter de prier (et de faire un peu de sport !)

Plusieurs conclusions.

L’Eglise est sainte ; elle est le Corps du Christ ; elle rassemble ceux qui nous ont précédés et que nous fêtons aujourd’hui, et nous qui cheminons encore vers le royaume de Dieu.

L’Eglise est composée de pécheurs; or Jésus est venu chercher et sauver ce qui était perdu : c’est l’évangile de dimanche dernier.

Nous sommes pécheurs, mais notre Père, grâce à Jésus, fait vraiment de nous ses fils et ses filles ; il partage avec nous sa sainteté.

La sainteté de Dieu est en nous, comme un don ; il dépend de nous d’y croire et de la déployer dans l’état de vie dans lequel nous sommes. Ce que nous sommes déjà est appelé à être totalement vrai dans la lumière du royaume de Dieu, là où vivent celles et ceux que nous honorons aujourd’hui.

Je termine par une phrase de la règle de St Benoît, une phrase qui ne manque pas d’humour : « Ne pas vouloir être appelé saint avant de l’être, mais l’être, afin que cela devienne vrai. » (cha. IV, verset 62)

 

Homelie du 23 octobre 2022   30ème dimanche ordinaire   Année C 

Ben Sira 35, 15b-17+20-22a     Ps 33     2 Tim 4,6-8+16-18     Lc 18, 9-14

 

Nous connaissons tous l’épisode Marthe et de Marie ; c’est un épisode qui, généralement, est mal aimé des dames qui pensent que Jésus méprise les humbles travaux ménagers. C’est une fausse lecture ; Jésus ne méprise personne. Il ne demande pas de choisirentre les deux sœurs, même s’il affirme que Marie a choisi la meilleure part. Il ne nous demande pas de choisir : il nous demande d’être en même temps (comme dirait …) Marthe et Marie. Il souhaite que notre action soit portée et soutenue par la prière et l’écoute de sa Parole, comme il souhaite que notre prière soit enrichie par notre action. Nous, nous opposonsles deux ; lui, il les réunit.

De même pour la parabole d’aujourd’hui. Jésus ne nous demande pas de choisir entre le pharisien et le publicain, du moins entre ce que fait de bien le pharisien, et l’humble attitude du publicain.  Car ce que fait le pharisien est bien : il jeûne deux fois par semaine (ce qui pourrait être profitable à notre santé) ; cela nous est rappelé chaque année, le mercredi des Cendres. Il verse le dixième de tout ce qu’il gagne, coutume que notre Moyen Age avait gardée par la dîme ; ça me permet de remercier tous ceux d’entre vous qui ont pensé – ou qui sont en train de penser – à cotiser au denier du culte. En plus, notre pharisien affirme qu’il n’est ni voleur, ni injuste, ni adultère ; dont acte ! C’est comme cela qu’il faut se comporter, on ne peut pas dire le contraire. Et même, de tout cela, il rend grâce, il remercie le Seigneur. Cela aussi est un bon rappel pour nous ; nous savons demander, ce qui est normal. Mais savons-nous remercier au moins autant que nous savons demander ? Je crois (mais je n’en suis pas certain) que c’est Péguy qui disait : « Il faut être poli avec le Bon Dieu. » Nous sommes si souvent des enfants impolis et ingrats !

Donc, le pharisien de notre parabole fait de bonnes choses ; il serait bon de nous inspirer. Mais il gâte tout en se comparant et en généralisant. En dressant la liste de ce qu’il fait, il donne, en creux, la liste de ce qu’il suggère que les autres hommes ne font pas. Il affirme : « Je ne suis pas comme les autres hommes. » Il accuse donc tous les autres hommes d’être voleurs, injustes et adultères. Voilà une généralisation pour le moins hâtive. Qu’en sait-il ? L’autre leçon de cette parabole pourrait bien être d’apprendre à ne pas porter de jugements sur autrui, que ce soit dans les relations de travail, de voisinage ou même de famille.

Du publicain, on ne sait pas trop ce qu’il fait ; contrairement au pharisien, il ne dresse aucune liste. On peut cependant imaginer les raisons pour lesquelles il se reconnaît pécheur. Nous connaissons, dans les évangiles, d’autres publicains en chair et en os : Zachée au chapitre 19 de st Luc. Si vous allez à Jéricho, on vous montrera le sycomore, aujourd’hui tout vieux et tout rabougri, sur lequel il est censé être monté pour guetter le passage du Seigneur. L’autre publicain de l’évangile est Matthieu, évidemment. Pourquoi les publicains sont-ils pécheurs ? Non pas parce qu’ils manipulent de l’argent, mais parce qu’ils sont toujours tentés de récupérer bien plus sur le dos de leurs compatriotes que ce qu’ils ont donné à Rome ; Zachée est clairement un voleur. De plus, à cause de cela, les pharisiens collaborent avec les romains qui sont non seulement des envahisseurs, mais, surtout, des païens.

Si déjà cette parabole nous aidait à retrouver ou à affermir une bonne morale fondamentale, elle aurait fait du bon travail. Mais Jésus n’est pas venu nous donner une morale : pour cela, l’Ancien Testament est suffisant, il suffit de l’appliquer. Par contre, Jésus est venu insuffler en nous la foi en lui, lui qui est le Sauveur universel. Son nom même l’indique : « Jésus » signifie « Dieu sauve. Mais il sauve de quoi et qui sauve-t-il ?

Il nous sauve de notre incapacité humaine d’atteindre Dieu par nos propres capacités. C’est cela qu’il reproche aux pharisiens de son temps et du nôtre : il leur reproche non pas d’être vertueux, mais de croire que c’est par leur seules forces et par leurs seuls mérites qu’ils seront ajustés à Dieu. Il leur reproche non pas leurs bonnes œuvres, mais de penser que ces bonnes œuvres sont capables, par elles-mêmes, d’atteindre Dieu. Il leur reproche de ne pas croire en lui qui vient faire le lien entre Dieu et l’homme, lui qui est à la fois Dieu et homme.

Si le publicain de notre parabole est justifié c’est-à-dire ajusté à Dieu comme deux pièces d’orfèvrerie sont ajustées l’une à l’autre, ou comme une note de musique est juste par rapport aux autres notes c’est que ce publicain ose reconnaître devant Dieu qu’il est pécheur et qu’il demande l’aide divine pour se relever. Contrairement au pharisien, il n’a rien à présenter à Dieu, à part son repentir et son désir immense de miséricorde.

Jésus est venu proposer le salut à tous les hommes, aux pharisiens comme aux publicains ; de son côté à lui, le travail est accompli, si je puis dire. De notre côté, il suffit seulement de dire : « J’accepte. » Comme Marie lors de l’Annonciation : Dieu a tout accompli en elle mais il a choisi d’avoir besoin du « Oui » de Marie.

Et ce simple « oui » qu’il attend de nous comme de Marie, est le premier pas vers le salut, ou vers la résurrection, ce qui est une autre manière de présenter les choses. Car la dernière phrase de notre évangile est : « Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »Il y a là bien plus et bien autre chose qu’une leçon de morale, ou même d’humilité. Qui s’est abaissé pour être relevé sinon Jésus lui-même ?  Nous reconnaître pécheurs devant lui est bien autre chose que souhaiter un bon coup d’éponge spirituelle. C’est demander et accueillir le salut, c’est-à-dire les premières lueurs de la résurrection.

 

 

 

 

 

Homelie du 2 octobre 2022   27ème dimanche   Année C

Ha 1,2-3 ; 2,2-4     Ps 94     2Tim 1, 6-8+13-14     Lc 17, 5-10

Par le Père Jean Paul Cazes

Nous sommes en présence d’une des formes de l’humour de Jésus. L’arbre qui se déracine et qui va se planter dans la mer est à mettre en parallèle avec lamontagne qui, dans l’évangile de St Marc, fait la même chose : « si quelqu’un dit à cette montagne « Ote-toi de là et jette-toi dans la mer » et s’il ne doute pas en son cœur, mais croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé. » (Mc 11,23) En st Marc, il ne faut pas douter ; en st Luc, il suffit d’avoir de la foi gros comme une graine de moutarde, ce qui n’est pas grand-chose. Ni vous ni moi n’avons l’équivalent d’une graine de moutarde de foi dans le cœur, heureusement d’ailleurs, car alors nos plages risqueraient de ressembler à la forêt amazonienne.

Je n’ai pas étudié la question, mais il me semble bien que ces images d‘arbre ou de montagne dans la mer sont des images de l’humour juif. L’humour de Jésus est bien celui de son peuple. Trop souvent, nous nous représentons Jésus grave, solennel. Grave, certes ! Ce qu’il vient nous révéler est nécessaire à notre salut. Grave, évidemment ! Il donne sa vie. Mais ça ne l’empêche pas d’avoir beaucoup d’humour. Il faut apprendre à le voir sourire lorsqu’il raconte plusieurs de ses paraboles ; c’est aujourd’hui le cas.

Les apôtres se sont tournés vers lui pour lui demander : « Augmente ne nous la foi ! »  Je ne sais pas sur quel ton ils ont demandé cela. Sur le ton de l’humilité ? Sur celui de la revendication ? De l’amertume ? ou de la simple constatation ? En tous les cas, Jésus leur répond sur le ton de l’humour. Il aurait pu être découragé devant la lenteur à croire de ses apôtres. Il aurait pu les rabrouer, ou se moquer d’eux. Non, il se contente de sourire en leur disant qu’en effet leur foi n’est pas plus grosse qu’une graine de moutarde.

Alors, au lieu de s’amuser à déplacer les forêts, les apôtres sont invités à faire humblement ce qu’ils peuvent faire. Au lieu de rêver de devenir les champions du monde de la foi, Jésus leur demande de mettre en œuvre leur foi telle qu’elle est au moment où ils parlent pour accomplir leur mission. Il faut toujours désirer développer notre foi, c’est évident ; mais il ne faut pas attendre qu’elle soit au top niveau pour la mettre en œuvre. Notre foi est déjà grande ? Tant mieux, elle fera des miracles. Notre foi est encore petite ? Elle peut déjà servir. Comment la développer ? Vous savez que c’est en marchant qu’on apprend à marcher ; c’est en croyant qu’on découvre la foi. « Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir. » Quand j’étais gamin, la traduction disait : « Nous sommes des serviteurs inutiles … ». Le mot à mot grec dit à peu près ceci : « Nous sommes des esclaves non indispensables … » Je pense qu’on pourrait dire : « Nous ne sommes que d’humbles serviteurs … »Que nous soyons de grands mystiques ou de pauvres pécheurs – d’ailleurs, les grands mystiques sont aussi des pécheurs –  il y a toujours moyen de servir à la table du Seigneur. Il y a tant à faire. Le serviteur fondamental est le Christ lui-même qui s’est fait serviteur par amour pour son Père et pour nous. Nous, nous sommes les serviteurs du serviteur.

Ayant alors accompli notre devoir avec les forces que nous avons, avec la foi qui est en nous, petite ou grande, nous aurons le bonheur d’entendre le Christ nous dire : « Je ne vous appelle plus serviteurs… ; je vous appelle amis. » (Jn15,15) C’est ainsi que Jésus rejoint le prophète Habacuc qui nous disait il y a quelques instants : « Le juste vivra par sa fidélité. » (Ha 2,4)

 

Homélie du 25 septembre 2022   26ème dimanche   Année C

Am 6,1a+4-7     Ps 145     1Tm 6,11-16     Lc 16,19-31

par le père Jean-Paul Cazes

            Une excellente manière de lire les textes bibliques qui nous sont donnés chaque dimanche est de repérer la bonne nouvelle qui s’y trouve. Le Nouveau Testament est tout entier une Bonne Nouvelle ; chaque page est une manifestation de cette Bonne Nouvelle. Il n’est pas nécessaire de connaître le grec et le latin, ni d’avoir entrepris de longues études d’Ecriture sainte, pour trouver la Bonne Nouvelle du jour.

            Il y a deux sortes de bonnes nouvelles si je puis dire. Il y a la Bonne Nouvelle générale, celle qui concerne tout le monde ; généralement, dans les paraboles, comme c’est le cas aujourd’hui, elle se trouve vers la fin : il s’agit de la Bonne Nouvelle de la Résurrection qui est dite sous forme négative : « S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. » Avec la Bonne Nouvelle générale, il y a aussi la Bonne Nouvelle particulière, celle qui concerne chacun d’entre nous, celle que chacun d’entre nous peut trouver s’il se donne la peine de la chercher ; celle-là, je ne peux pas la trouver à votre place. A vous de la chercher.

            Chercher ainsi la Bonne Nouvelle dans un texte biblique permet de ne pas partir sur de fausses pistes. Une parabole est une histoire inventée par Jésus pour nous faire comprendre une vérité. Un peu, je vous l’ai déjà dit, comme les fables de La Fontaine qui nous délivrent une vérité sous des aspects inventés. Ici, dans notre parabole, il y a au moins deux fausses pistes.

            La fausse piste de l’inversion sociale, et celle de la description du paradis et de l’enfer. L’inversion sociale est celle qui affirme que les pauvres seront riches en paradis, et que les riches perdront tout. C’est une théorie semblable que les communistes nous ont longtemps reprochée car elle permet aux riches de garder leurs richesses ici-bas et de dire aux pauvres qu’ils n’ont qu’à patienter puisqu’ils seront riches plus tard.

            Autre fausse piste : celle de la description du parais et de l’enfer que contient cette parabole. Vous savez bien que le paradis n’est pas un lieu, mais un état, l’état de bonheur d’être avec Dieu pour toujours. De même, l’enfer n’est pas un lieu mais un état, l’état de celui qui est séparé de Dieu à jamais. Pour évoquer cet état de séparation et la douleur de celui qui serait à jamais séparé de Dieu, Jésus utilise deux images fortes : celle du grand abîme, et celle de la fournaise. Mais ce ne sont que des images.

            Après avoir ainsi éliminé les fausses pistes, revenons à la bonne nouvelle de cet évangile qui est le but de notre parabole : le rapport entre l’écoute de la Parole de Dieu et la foi en la résurrection de Jésus. Encore une fois, il s’agit du dernier verset d’aujourd’hui : « S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. »

            La résurrection de Jésus est le pivot de notre foi. Si le Christ n’est pas ressuscité, écrit Paul, notre foi est vide (1 Co 15,14). Nous ne croyons pas en un Dieu mort, mais en un Dieu mort et ressuscité. Notre mission consiste à annoncer et à témoigner de Jésus vivant. Mais si nous abordons un athée en lui parlant, sans précaution, de la résurrection du Christ, il est fort possible qu’il n’accepte pas notre annonce. Rappelez-vous que Paul lui-même n’a pas été accueilli lorsqu’il a annoncé le Christ ressuscité aux sages d’Athènes ; c’est le moment que représente le tableau qui se trouve dans le chœur de notre église.

            Annoncer le Christ ressuscité est fondamental ; nous n’annonçons pas une doctrine, même si la doctrine est nécessaire à l’intelligence; nous n’annonçons pas une morale, même si la morale est nécessaire pour notre vie quotidienne. Nous annonçons un Dieu vivant qui s’est manifesté dans la personne de Jésus-Christ, mort et ressuscité. Mais la pédagogie qui permet cette annonce passe par la Parole de Dieu contenue dans toute la Bible. Jésus est la Parole de Dieu faite chair ; il est comme l’aboutissement de l’enseignement de Moïse et des Prophètes. Pour accueillir la révélation de la résurrection de Jésus, il est indispensable de s’appuyer sur la Parole de Dieu, lue et méditée.

            Lors de l’enquête sur une meilleure utilisation de nos locaux paroissiaux beaucoup ont demandé une meilleure formation biblique : c’est réjouissant ! Déjà, vous avez tous, à votre disposition, le groupe « Vivre la Bible » qui se réunit environ chaque mois, le groupe de partage des textes bibliques du dimanche qui se réunit chaque semaine. Dans peu de temps, vous aurez des propositions en ce qui concerne l’évangile de St Matthieu. Vous avez aussi les « mini-retraites » trimestrielles dont les dates vous seront données ; ces mini-retraites reposent évidemment sur la parole de Dieu. Et puis, mine de rien, les homélies dominicales vous donnent aussi des clefs de compréhension des textes bibliques; j’espère que vous vous en servez.

            En dehors de notre paroisse, existent beaucoup de propositions de formation biblique, soit en présentiel, soit en ligne ; à vous d’être curieux pour trouver celle qui vous convient.

            La foi en la résurrection du Christ s’appuie et se nourrit de la connaissance de la Bible, Ancien et Nouveau Testaments réunis. La parole écrite de la Bible nous ouvre ainsi à la compréhension et à la foi en la Parole de Dieu faite chair. La parole biblique, inspirée par l’Esprit Saint, nous mène au Christ ressuscité.

Homélie du 26° dimanche C (25 septembre 2022) : journée de rentrée

Lectures : Am 6,1-7 ; Ps 145 ; Tim 6,11-16 ; Lc 16,19-31

par le père Yvan Marechal

La parabole de l’Évangile nous présente deux personnes que tout oppose : d’un côté, un homme riche, anonyme, vautré sur son divan, replié sur ses biens comme un rapace et se suffisant à lui-même ; d’un autre côté, un homme pauvre, appelé Lazare, gisant dans la poussière et mendiant quelques miettes, à la manière d’un chien au pied de la table de son maître. D’un côté, le riche ne voit rien, il ne sait pas ce qu’il y a de l’autre côté de son luxe, il est inconscient ; de l’autre, le pauvre voit, il sait comment vit le riche, il est conscient de la situation injuste. D’un côté, le riche a érigé un mur protecteur infranchissable et se coupe du monde extérieur ; de l’autre, le pauvre voudrait détruire cette forteresse qui les sépare et ne le peut pas.

Cette situation intolérable, nous la connaissons tous, parce que nous voyons encore des pauvres autour de nous et Jésus nous en a averti le jour où il a déclaré : « Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous. » Nous observons, par exemple, des clochards qui ont décroché de la société, des gens inadaptés à nos structures, des migrants ou des réfugiés entassés comme des loques humaines. Comment les regardons-nous ? Quelle compassion avons-nous à leur égard ? Chacun peut consulter sa propre conscience.

Dans l’au-delà, cependant, on assiste à une inversion des rôles : le riche devient le mendiant, mais n’obtient rien, car il s’est installé dans une situation définitive ; quant au pauvre, il est porté par les anges dans les bras d’Abraham, il est dans la béatitude. La mise à l’écart du riche est évidemment destinée à nous faire réagir.

Dans les Évangiles, les paraboles racontées par Jésus servent généralement à révéler la personnalité de Jésus. Qui donc est ce Lazare de la parabole ? C’est Jésus, bien sûr, qui s’identifie au plus petit et au plus pauvre et qui n’espère rien d’autre que le secours de son Père, comme il l’expérimentera dans sa Passion. Lazare, c’est donc Jésus qui mendie notre amour. Voilà pourquoi, en se coupant du pauvre, le riche se coupe de Dieu, il ne comprend pas que Dieu mendie son amour et sa miséricorde. Et puisqu’il n’a aucun lien avec Dieu, comment peut-il ensuite mendier l’infini et l’éternité ? Le riche sans compassion se condamne à être exclu d’un regard de compassion envers lui.

Au lieu d’ériger des barrières entre les hommes, ne sommes-nous pas destinés à construire des ponts ? Ainsi, quand le pape François s’exprime au sujet des migrants, et pas seulement aujourd’hui parce que c’est la journée mondiale du migrant et du réfugié, il ne fait rien d’autre que de proposer des ponts, comme Jésus l’exige, même si cela nous dérange tous, et moi le premier ! C’est d’ailleurs tout le sens du mot pontife : le Souverain Pontife, c’est justement celui qui dresse des ponts entre Dieu et les hommes. Ainsi le pape François ne cherche-t-il pas à donner des solutions toutes faites aux gouvernants, il veut engager un nouveau mode de vie entre les hommes, fondé sur la Parole de Dieu. De fait, la Parole de vie nous engage toujours à poser des actes en faveur de la vie. Ce sera toujours un scandale de tuer, et aujourd’hui d’euthanasier. Ce sera toujours un scandale de laisser quelqu’un mourir en pleine mer ou sur un trottoir, sous une tente ou dans un bidonville, comme s’en insurgeait déjà l’abbé Pierre sur le parvis de notre église pendant l’hiver 54.

Jésus n’est-il pas venu briser les portails invincibles que nous avons fermés avec des scellés ? N’est-il pas venu rapprocher les distances infranchissables que nous avons posées entre nous ? Par conséquent, la grande chance de notre foi en Dieu, c’est de pouvoir reconnaître que tout homme est fait à l’image de Dieu. Certes, Jésus réserve sa préférence aux pauvres à cause de leur fragilité et de leur ressemblance avec lui, qui de riche qu’il est par sa divinité s’est fait pauvre en devenant homme. Je veux rendre grâce avec vous pour les associations et les mouvements qui œuvrent en faveur des plus faibles et tendent la main de Dieu : je pense au Secours catholique, à la Conférence Saint Vincent de Paul, au Service Évangélique des malades, qui font le lien entre la paroisse et les personnes ou les familles isolées ; je pense aussi à la Pastorale des peuples qui a le souci des personnes éloignées de leur pays. Saint Charles de Foucauld n’a-t-il pas voulu devenir le frère universel dans le désert du Hoggar ?

Dans la parabole, Lazare se tient devant le portail de la maison de l’homme riche. Le portail de notre église Saint-Pierre-Saint-Paul est un espace qui introduit à l’intérieur de la maison de Dieu et doit donner accès à Dieu lui-même. C’est par le portail qu’entrent les futurs baptisés accueillis sur le parvis le jour de leur baptême. Le porche est l’espace intermédiaire entre le monde profane et le monde sacré, il symbolise le seuil de la communauté chrétienne. C’est là que chaque dimanche se tiennent des laïcs qui vous accueillent au début et à la fin de nos célébrations : non seulement ils vous présentent le bulletin paroissial et le carnet de chants avec le sourire de Dieu, mais ils remplissent un rôle missionnaire prépondérant, car les accueillants sont les premières personnes rencontrées par ceux qui poussent timidement la porte pour voir ce qui se passe ici et peut-être pour faire une première rencontre avec le Seigneur.

Je me souviens d’un jeune homme qui m’avait contacté un jour après être entré dans mon église et avoir été impressionné par le mystère qui y était célébré et chanté ; quelques années après, je le baptisais ! C’est cela l’évangélisation du seuil ! Je pense aussi aux baptêmes et aux mariages que nous fêtons chaque week-end, aux funérailles que nous célébrons, au catéchisme et à l’aumônerie où nous nous investissons beaucoup ; nous touchons là de nombreuses familles éloignées de la foi et de la pratique chrétiennes. Alors, quelle pédagogie mettons-nous en place pour les atteindre, pour les intéresser au Dieu de Jésus-Christ et pour que l’Esprit-Saint les touche ? Je n’oublie pas la Maison paroissiale où nous passerons le reste de la journée. Je souhaite consacrer cette maison comme un lieu convivial, frontalier entre l’Église et le monde, pour que l’Église soit « en sortie » jusqu’aux périphéries et que le monde, qui est aujourd’hui si peu préoccupé de Dieu, puisse y recevoir une parcelle de vie divine. La Maison paroissiale accueillera entre autres des dimanches festifs, des ateliers créatifs et un jardin partagé, nous en reparlerons cet après-midi. Malheureusement l’Église s’enlise trop souvent dans des querelles de chapelles et des conflits d’intérêts, alors que l’évangélisation devrait être sa première préoccupation.

C’est pourquoi je vous lance une fois de plus un appel fort à agir dans un esprit vigoureusement missionnaire. Il y a 40 ans le pape Jean-Paul II appelait l’Église occidentale à une nouvelle évangélisation, non parce qu’il faudrait partir en croisade contre un monde redevenu païen, mais parce que, comme les chrétiens du premier siècle dans les Actes des apôtres, il nous voulait animés par la soif de faire connaître Jésus-Christ et son Évangile. À vue humaine, l’Église perd de sa force et de son influence, mais ne nous résignons pas. Dieu, en effet, ne laissera jamais tomber l’Église qu’il a instituée. Ses moyens, c’est son Saint-Esprit qui nous inspire et nous guide, c’est la Parole de son Fils Jésus qui interpelle chacun, c’est la communauté chrétienne à laquelle nous appartenons, ce sont les sacrements qui agissent efficacement dans nos vies. Son but, c’est que le monde entier croie en lui. C’est ainsi que Jésus nous embarque dans sa mission et nous dit comme à la fin de l’évangile de Matthieu : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. »

Pour suivre le Christ dans cet élan missionnaire, la vie spirituelle doit recevoir une force de propulsion, c’est ce que l’on appelle, dans le langage de l’Église, les cinq essentiels de la vie chrétienne : ils sont comme cinq vitamines A, B, C, D et E, vitamines qui donneront à l’Église une dynamique de croissance contre toute forme d’essoufflement. Ces cinq essentiels se trouvent inscrits à la première page du bulletin paroissial. Je vous invite à les lire avec moi.

  • L’adoration : avec cette vitamine, il s’agit dans un premier temps de se reconnaître fils et filles de Dieu, de vivre une relation personnelle et vivante avec le Christ dans l’Esprit Saint, grâce à la prière, à la liturgie et aux sacrements. Nous devons tous, jeunes ou anciens, habiter notre intériorité, réinvestir notre vie spirituelle. L’adoration le jeudi soir jusqu’à 22 h est faite pour cela. Y êtes-vous déjà venus en famille ?
  • La fraternité : c’est vivre en frères et sœurs de Jésus et favoriser l’amour du prochain, l’accueil et le soutien mutuels dans de petites communautés de partage. Chaque groupe paroissial, chaque activité est déjà en elle-même une petite communauté de partage fraternel. Avons-nous conscience d’appartenir à la même famille des enfants de Dieu ? Comment entretenons-nous ces liens dans l’Église ?
  • La formation : devenir disciple du Christ, c’est se mettre à son école et écouter sa Parole pour grandir dans la conversion et l’intelligence de la foi et discerner ses talents. Voulons-nous bien scruter chaque jour l’Évangile pour nous laisser transformer par Jésus ?
  • Le service : en s’engageant dans la communauté chrétienne et en prenant des responsabilités selon ses talents, on devient serviteur pour le bien de tous. Acceptons-nous de servir ou de prendre des responsabilités à la mesure de nos forces physiques, comme le Christ notre roi qui lava les pieds de ses disciples ?
  • L’évangélisation : formé aux quatre étapes précédentes, chacun devient alors un apôtre capable de témoigner de son expérience de l’amour de Dieu et de sa connaissance de Jésus-Christ mort et ressuscité pour nous. Ai-je envie de développer en moi le zèle de l’apostolat ?

Je souhaite que ces cinq essentiels irriguent toute notre vie chrétienne, ils doivent être expérimentés dans toutes les familles et vérifiés dans chaque activité paroissiale à laquelle nous appartenons. Ils deviendront alors un véritable chemin de transformation spirituelle pour toute notre communauté paroissiale.

En regardant le dessin affiché dans l’angle à gauche du  bulletin paroissial, les flèches signalent la puissance de propulsion de ces cinq essentiels. Par conséquent, toute personne qui veut faire un chemin de foi devrait premièrement faire une rencontre vivante avec le Seigneur, deuxièmement s’intégrer dans la communauté chrétienne faite de frères et sœurs, troisièmement se former à l’école de Jésus pour lui ressembler comme l’ont fait les disciples, quatrièmement se mettre au service des autres pour exercer le don de soi et cinquièmement annoncer le Christ et l’Évangile. Le point de départ est l’adoration et le point d’arrivée est l’évangélisation. C’est seulement ainsi que le disciple deviendra à son tour missionnaire : il sera donc un disciple missionnaire, selon une formule qui a été forgée par le pape François. Pour conclure, je vous indique, en bas de la page du bulletin, l’ambition que j’ai pour notre paroisse, pour les années à venir. La voici :

Notre vision pastorale est de construire une communauté paroissiale composée de disciples missionnaires vivant dans une dynamique de croissance grâce aux cinq essentiels de la vie chrétienne. Ces cinq forces devraient nous ancrer davantage dans le Christ et susciter en nous le désir de l’annoncer au monde. Voulez-vous me suivre dans cette aventure ? Amen !

Père Yvan Maréchal

 

Homélie du 18 septembre 2022   25ème dimanche   Année C

Am 8,4-7     Ps 112     1Tm 2,1-8     Lc 16,1-13

Par le Père Jean Paul Cazes

Dimanche dernier, nous avions droit aux trois paraboles de la miséricorde en St Luc : la brebis retrouvée, la pièce d’argent retrouvée et l’enfant prodigue. Ces trois paraboles étaient destinées à un public très vaste de collecteurs d’impôts, de pécheurs, de pharisiens et de scribes. La parabole qui suit immédiatement – la parabole qui nous est donnée aujourd’hui – s’adresse aux disciples, ce qui est un public plus restreint que le précédent. Comme si le Maître souhaitait donner un enseignement plus précis à ceux qui ont choisi de le suivre. J’ignore quel nom vous donneriez à cette parabole ; moi je lui en ai trouvé plusieurs : « Du bon usage de l’argent » ou « Eloge de l’habileté spirituelle » ou « Fils de ce monde et fils de la lumière ». A vous de chercher et de trouver ce qui vous semble le plus important dans cette parabole.

Une parabole que les disciples – et nous en faisons partie – n’ont pas pu recevoir sans un minimum de sens de l’humour. Certes, dans les évangiles, on ne voit pas Jésus rire. Mais ça ne l’empêche pas d’être rempli d’humour. Rien ne nous empêche de le voir sourire quand il raconte ses paraboles qui s’apparentent souvent à des histoires d’humour juif. C’est le cas aujourd’hui. Si ce n’est pas de l’humour, on risque de recevoir cette parabole comme un encouragement à la malhonnêteté, ce qui est un faux-sens, bien sûr. Jésus fait l’éloge de l’habileté du gérant mais pas de sa malhonnêteté. D’où la conclusion provisoire de la parabole : « Les fils de ce monde sont plus habiles entre eux que les fils de la lumière. » Une conclusion qui sera comme redoublée sous une autre forme par le verset suivant : « Eh bien moi, je vous dis : Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête afin que, le jour où il ne sera plus là, ces amis vous accueillent dans les demeures éternelles. » Si j’avais poursuivi la lecture, j’en serais parvenu à la conclusion définitive de tout ce discours : « Vous ne pouvez servir à la fois Dieu et l’argent. »

Souvent – et je le vois au catéchisme – un enseignement est mieux accueilli s’il est donné avec le sourire. L’enseignement d’aujourd’hui est grave. Jésus nous invite à choisir entre son Père et le dieu de ce monde. Ce qui était vrai pour les disciples autour de Jésus est aussi vrai aujourd’hui. Même si ça tombe mal !

Ça tombe mal au moment de la crise énergétique. Ça tombe mal au moment où le pouvoir d’achat diminue encore. Ça tombe mal au moment où le prix de fruits, des légumes verts, du pain augmente. Ça tombe mal au moment où 75% des français sont pessimistes face à l’avenir. Ça tombe mal au moment le temps de l’abondance touche, paraît-il, à sa fin, cette abondance que même beaucoup de français n’ont d’ailleurs jamais connue.

Mais dans ce moment morose, nous qui avons Jésus comme lumière et comme guide, nous qui avons reçu la force et l’humour de l’Esprit, il est plus que temps de devenir ce que nous sommes : le sel. Car nous sommes le sel de la terre et la lumière du monde. Jésus nous demande d’être aussi habiles et astucieux que les diplomates, les industriels, les politiciens, les financiers

Si 75% des français sont moroses face à l’avenir, j’imagine que beaucoup de catholiques font partie de ces 75% ; le contraire serait étonnant. Catholiques ou non, le prix de l’énergie est le même pour tous, le prix de la nourriture et de la santé est le même pour tous, les questions face à la réforme des retraites sont les mêmes pour tous, les inquiétudes face au dérèglement du climat sont les mêmes pour tous. Mais nous, nous avons Jésus !

Bien sûr, ce n’est pas Jésus qui va régler les factures de fin de mois. Ce n’est pas lui qui va remplir le panier de la ménagère, ce n’est même pas lui qui va rétablir le climat d’un coup de baguette magique. Si quelqu’un doit se retrousser les manches, ce n’est pas lui, car c’est déjà fait ; c’est nous. Chacun de nous à notre mesure, et nous, collectivement. Nous particulièrement les chrétiens parce que nous avons Jésus. Jésus ne règle rien, mais il ouvre un avenir car il nous aime. Un fiancé me disait un jour : « Je suis amoureux. Je dois toujours travailler, payer mes impôts, ça ne change pas. Mais je suis amoureux : et ça, ça change tout. »

Notre habileté à nous, fils et filles de la lumière, nous la puisons dans la prière, dans les sacrements, dans la Parole de Dieu lue et étudiée. Notre habileté à nous se trouve dans ce grand mouvement de synodalité que le Pape François souhaite pour l’Eglise. Notre habileté ici, dans cette paroisse, réside dans vos engagements, dans l’accueil réservé à ceux qui viennent de loin demander un sacrement, dans les projets de meilleure utilisation de nos locaux paroissiaux, dans les mouvements de jeunes … Nous ne sommes pas démunis. Nous avons tout cela. Mais, surtout, nous avons Jésus.

Sommes-nous suffisamment amoureux de Jésus pour changer notre monde ? Car là est la source de notre habileté.

L’humour, notre humour et celui de Jésus, ce n’est pas la rigolade : c’est la capacité que donne l’amour de prendre du recul pour pouvoir améliorer la vie et l’orienter vers notre Père.

 

 

 

Homelie du 11 septembre 2022   24ème dimanche   Année C

 

Ex 32,7-11+13-14     Ps 50     1Tm 1,12-17     Lc 15,1-32

Par le Père Jean Paul Cazes

La liturgie me laissait la possibilité de ne lire que les deux premières paraboles du chapitre 15 de st Luc : la parabole de la brebis perdue et retrouvée, et celle de la pièce d’argent elle aussi perdue et retrouvée. Malgré sa longueur, je n’ai pas voulu amoindrir ce chapitre ; avec les deux premières, j’ai lu aussi la parabole qu’on appelle maladroitement la parabole de l’enfant prodigue. C’est un mauvais titre. D’abord, il ne vient pas de st Luc lui-même ; ce titre ne fait heureusement pas partie de la Parole de Dieu. Ensuite, parce que le récit met en scène le fils aîné tout autant que son jeune frère. Enfin, parce que la figure qui donne son unité au récit est celle du Père. Le Père qui court à la rencontre de son fils cadet qui revient à la maison. Le Père qui sort à la rencontre de son aîné pour le supplier d’entrer. Je ne sais pas quel titre vous aimeriez donner à cette extraordinaire parabole, mais il faudrait que ce soit un titre qui mette en lumière la figure du Père, ou son attitude envers ses deux fils. Son attitude de miséricorde.

Souvent j’entends dire qu’on ne prie pas facilement le Père car il paraît trop lointain ; on prie plus facilement le Christ qui est un être humain comme nous. Si le Père paraît si lointain, c’est peut-être qu’on n’ose pas croire au réalisme de ces trois paraboles de la miséricorde. Il est probable que Jésus ne les a pas données en même temps ; c’est st Luc qui les a rassemblées dans le but évident d’insister sur un point capital de notre foi : le Père dont Jésus nous parle, le Père dont Jésus est le visage sur terre (« Qui m’a vu a vu le Père » dit Jésus ; Jn 14,9), le Père dont il vient nous ouvrir le Royaume est un Père de miséricorde. Déjà, l’Ancien Testament pressentait cela ; Moïse, par sa prière instante, fléchit la juste colère de Dieu qui déclarait vouloir anéantir le peuple infidèle. La phrase finale de notre première lecture est admirable : « Le Seigneur renonça au mal qu’il avait voulu faire à son peuple. » Pour l’Ancien Testament, voilà une manière d’affirmer que Dieu n’est pas un Dieu de destruction mais un Dieu d’Alliance et de miséricorde. Le Nouveau Testament va jusqu’au bout de cette logique : Jésus révèle que Dieu a un nom particulier : Père. Et que ce Père est le Père de tous les hommes, qu’ils soient croyants ou non.

Précisons tout de suite que la miséricorde dont il s’agit n’est pas de la faiblesse. La miséricorde du Père n’est absolument pas laxiste. La vieille chanson « Nous irons tous au Paradis » est exacte si nous pensons que le désir de Dieu est de sauver tous les hommes ; mais elle est fausse si elle laisse penser qu’on peut accéder à Dieu sans se convertir à lui, sans adopter, durant notre vie terrestre, les manières de faire de Dieu.

Or, ses manières de faire sont des manières de miséricorde. Notre Dieu, notre Père, n’a pas de miséricorde : il EST miséricorde. Il passe son temps, si je puis dire, à faire miséricorde à ceux qui acceptent de l’accueillir. Dans notre seconde lecture, Paul, par deux fois, écrit qu’il lui a été fait miséricorde alors qu’il ne le méritait pas.

Si j’avais un fils qui se soit conduit comme le cadet de l’évangile, il est probable que je l’accueillerais en mettant quelques conditions. Humainement parlant, il est un peu facile de faire n’importe quoi et de voir à son retour la porte grande ouverte et la fête autour de soi. Humainement parlant ! Mais, divinement parlant … !

Heureusement pour chacun d’entre nous, Dieu notre Père a des manières de faire qui ne sont pas des manières humaines. Il aime chacun de nous sans condition. Il aime non pas de façon humaine, mais de façon céleste : au lieu de dire « Notre Père qui es aux cieux … », il serait préférable de dire : « Notre Père céleste … » c’est-à-dire « Notre Père qui a des manières célestes, autres que des manières humaines. »

 

Dans le court silence qui va suivre, que chacun de nous essaie de ramener à la mémoire de son cœur les moments pendant lesquels il a bénéficié de la miséricorde du Père. Car, forcément, nous en avons tous bénéficié, même si nous n’en avons pas eu conscience sur le moment.

Nous sommes tous, grâce à Jésus, les enfants préférés de notre Père !

 

Homélie du 21 août 2022   21ème dimanche Année C

Is 66,18-21     Ps 116     Hbx 12,5-7+11-13     Lc 13,22-30

Par le pere Jean Paul Cazes

A partir de l’évangile que je viens de lire, je souhaite soulever trois points de réflexion. A vous de saisir celui qui vous aidera à mieux vivre votre vie de foi durant la semaine.

 

Quelqu’un, dit notre évangile, pose une question à Jésus. Ce quelqu’un n’est pas nommé. Ce peut être chacun de nous. Nous avons le droit de poser des questions à Jésus. La prière est faite pour ça. Souvent, on pense qu’on a prié quand on a dit des prières. Or, prier, ce n’est pas dire des prières. Dire des prières est une aide pour prier, pour prier personnellement à la manière dont Jésus lui-même nous enseigne de prier. Et dans notre prière personnelle, nous avons le droit de poser des questions à Jésus. Les questions que nous nous posons à nous-mêmes, nous avons le droit de les poser à Jésus. Prier, c’est parler personnellement à Jésus, ou à Dieu notre Père, ou à l’Esprit Saint.

Et donc, premier point de réflexion pour la semaine à venir : tout en conservant les prières que nous connaissons et que nous aimons – en particulier le Notre Père et le Je vous salue Marie – pourrions-nous personnaliser notre prière en osant poser à Jésus les questions qui sont les nôtres ?

 

Second point. La question posée à Jésus porte sur le nombre de celles et ceux qui seront sauvés : combien seront admis dans les bras du Père ? C’est une question semblable à celle posée par un légiste : « Qui est mon prochain ? » Le légiste voulait une liste claire de prochains et de lointains pour accueillir les premiers et rejeter les seconds. Dans notre évangile, l’homme qui interroge Jésus veut savoir quel est le nombre de sauvés ; et peut-être – c’est la questions sous-jacente – s’il sera du nombre. Or, Jésus déplace la question ; il ne veut pas entrer dans cette question de nombre ; en ce qui concerne le salut, il n’y a pas de quota contrairement aux études de médecine. Dieu veut que tous les hommes soient sauvés, il ne veut en perdre aucun. Voilà pourquoi Jésus déplace la question. Il répond : « Efforcez-vous d’entrer … » Ce qui veut dire : ce n’est pas à mon Père ou à moi de faire le tri. C’est à vous de décider si oui ou non vous souhaitez être sauvés.

Et donc, second point de réflexion pour la semaine à venir : nous avons le droit de poser à Jésus toutes les questions que nous voulons ; mais nos questions sont parfois, ou même souvent, mal posées. Comme tout bon enseignant, Jésus les déplace. Nous posons une question et nous nous étonnons de ne pas recevoir une réponse ; nous voudrions une réponse dans les termes mêmes de notre question. Jésus répond, mais pas forcément dans les termes que nous attendons. Il faut accepter que notre question soit probablement mal posée ; il est nécessaire de chercher la réponse de Jésus.  Et de la chercher dans la prière confiante.  

 

Dernier point de réflexion que je ne ferai qu’effleurer tant il est vaste. Le brave homme de notre évangile se pose une question au sujet du nombre de celles et ceux qui seront sauvés. Mon point de réflexion est : qu’est-ce que le salut ? Le salut éternel est une question qui a beaucoup préoccupé nos ancêtres dans la foi, au point même de les mener à délaisser la vie de ce monde. Notre foi contemporaine a heureusement pris conscience qu’on ne peut vouloir être aimés de Dieu sans aimer son prochain ; qu’on ne peut vouloir la justice dans la vie éternelle sans essayer de l’appliquer dans cette vie ; qu’on ne peut désirer la paix du royaume de Dieu sans être dès maintenant des artisans de paix. Nous ne pouvons vouloir le royaume de Dieu en négligeant ce monde. Dieu lui-même a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils unique écrit St Jean (cf. Jn 3, 16). Mais la nécessaire gestion de la vie de ce monde nous entraîne parfois à repousser bien loin de nous la question du salut, comme si elle n’était bonne qu’au moment de notre mort. Or, cette question du salut n’est pas une question de l’après, mais une question liée à notre vie actuelle. Alors, qu’est-ce que le salut ? Beaucoup de définitions peuvent en être données. Chacun de vous a probablement la sienne. Je vous en suggère une : être uni à Dieu notre Père par la foi en Jésus. Ce n’est pas une définition mais seulement une suggestion. Mais elle est valable non seulement pour a vie éternelle mais pour notre vie actuelle.

Et donc, troisième point de réflexion pour la semaine à venir : est-ce que le salut, dont parle si souvent Jésus, est une question qui colore ma vie d’aujourd’hui ? Est-ce que le salut est une question importante de ma vie de foi ? Est-ce que le salut m’intéresse ?

 

Je résume : osons poser des questions dans la prière et chercher la réponse de Jésus ; n’opposons pas vie actuelle et vie future en ce qui concerne le salut. Voilà mes trois points de réflexion.

Mais il y en a peut-être un quatrième ou un cinquième qui vous est venu à l’esprit à l’écoute de notre évangile ! Alors, n’hésitez pas à l’approfondir dans votre prière au cours de la semaine à venir.

 

 

Homélie du 26 juin 2022   Solennité de St Pierre-St Paul

26 juin 2022   Solennité de St Pierre-St Paul

Ac 12,1-11     Ps 33(34)     Tim 4,6-8+17-18     Mt 16,13-19

par le Père Jean Paul Cazes

Quand la fête patronale d’une paroisse tombe durant la semaine – c’est souvent le cas – les règles liturgiques permettent à cette paroisse de célébrer son saint patron lors du dimanche le plus proche de la fête. Voilà pourquoi notre paroisse fête aujourd’hui Pierre et Paul dont la double mission est évoquée dans le livre des Actes de Apôtres.

Dans le monde entier, de nombreuses paroisses sont placées sous le patronage conjoint de Pierre et de Paul. Pour ne parler que de notre seul diocèse, cinq paroisses portent leurs noms à Clamart, à Colombes, à Fontenay aux roses, à Rueil et chez nous.

Cette fête commune des deux Apôtres remonte très loin dans le temps puisqu’on sait qu’elle existait déjà à Rome au Vème siècle. Elle nous est également commune avec les Eglises orthodoxes de rite byzantin. C’est dire sa grande valeur vénérable. C’est dire aussi la confiance du peuple chrétien de tous les temps dans l’intercession et la protection de Pierre et de Paul.

Dans notre église, deux œuvres d’art se rapportent à notre fête. D’abord, dans le chœur, sur votre droite, on voit une toile évoquant la libération de Pierre telle que la première lecture la raconte. Quant à l’affirmation de Paul sur le bon combat qu’il a mené, elle est évoquée sur l’un des vitraux qui se trouve dans le bas-côté gauche. N’ayez pas peur, après la messe, de passer deux ou trois minutes à regarder ces œuvres ; chaque fois que je le propose, personne n’ose le faire. Vous avez même le droit d’entrer dans le chœur ; vous ne risquez rien !

Pierre et Paul sont vénérés ensemble parce qu’ils ont donné leur vie pour le Christ aux environs de l’année 60. Par ce fait, ils sont considérés comme les fondateurs de la communauté chrétienne de Rome. Il faut faire la différence entre créateur et fondateur. Lorsque Pierre et Paul, séparément, sont arrivés à Rome, il y avait déjà quelques chrétiens ; on en trouve mention dans les Actes de Apôtres. Cela signifie que la communauté chrétienne était déjà créée. Mais, par leur apostolat et, surtout, par le don de leur vie – Pierre par sa crucifixion, Paul par sa décapitation –  ils sont devenus les fondements solides de cette communauté. C’est ce qu’écrit Paul aux chrétiens d’Ephèse : « Vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondation les apôtres et les prophètes, et Jésus-Christ lui-même comme pierre maîtresse. » (Ep 2,20)

Parce qu’ils sont eux-mêmes attachés à Jésus-Christ, fondés sur lui, Pierre et Paul sont fondateurs et missionnaires. En même temps – si j’ai le droit d’employer cette expression – en même temps fondateurs et missionnaires. C’est très clair dans la vie de Paul qui n’a cessé de fonder des communautés au long de sa vie missionnaire tout autour de la Méditerranée. Par sa mission, Paul fondait des communautés qui devenaient elles-mêmes missionnaires.

Il en est ainsi pour toute l’Eglise à la suite de Pierre et de Paul. L’Eglise tout entière, fondée sur les Apôtres, n’a de sens, de valeur, que si elle annonce Jésus-Christ. Les communautés qui composent l’Eglise ne peuvent subsister que si elles annoncent Jésus-Christ. Les paroisses, les fraternités, les ordres religieux, etc., etc. ne peuvent subsister que s’ils annoncent Jésus-Christ.  L’Eglise tout entière n’a de sens et de valeur que si elle annonce Jésus-Christ à travers tout ce qu’elle fait. Une paroisse comme la nôtre, qui a ses lettres de noblesse, qui n’est pas née d’hier, n’a de sens et de valeur qui si elle annonce Jésus-Christ à travers tout ce qu’elle fait et tout ce qu’elle pourrait faire. Une paroisse comme la nôtre, surtout avec les saints patrons qui sont les siens, n’a de valeur que si elle annonce Jésus-Christ. Elle n’est pas là pour notre confort spirituel personnel : elle a été fondée pour annoncer Jésus-Christ.

Je fais un rêve (comme a dit en son temps le pasteur Martin Luther King). Je fais un rêve. Je vois tous les membres de notre paroisse se saluer dans la rue, se reconnaître, prendre des nouvelles les uns des autres. Je vois tous les membres de notre paroisse arriver heureux à la messe et se donner le geste de paix avec joie. Je vois tous les membres de notre paroisse si heureux d’être ensemble, si heureux de célébrer Jésus-Christ, qu’ils attirent vers le Christ de nouveaux membres, ces personnes que nous côtoyons chaque jour dans la rue et qui ne connaissent pas encore Jésus-Christ. Je rêve au fait que la qualité de la vie de notre communauté paroissiale soit un signe missionnaire pour nos concitoyens.

Pourquoi ce rêve serait-il hors de notre portée ? Les premières communautés chrétiennes, décrites dans les Actes de Apôtres, vivaient de cette manière. Ce serait une bonne chose que vous partagiez mon rêve de façon à ce qu’on dise de notre communauté paroissiale ce qu’on disait des premières communautés : Voyez comme ils s’aiment !