Homélie du 12 janvier 2025 Baptême du Seigneur

Par le père Jean Paul Cazes

Isaïe 40,1-5+9-11 Psaume 103 Tite 2,1114 ; 3,4-7 Lc 3,15-16+21-22

Pourquoi Jésus a-t-il été baptisé ?

Le baptême qu’il a reçu est-il le baptême qu’il nous donne ?

Quelle est la place de ce baptême dans l’ensemble de sa vie ?

Voilà les trois questions que je me suis posé. Chacune mérite une conférence, ce qui ne peut se faire ce soir. Je vais essayer cependant de vous donner quelques indications claires, tout en vous suggérant de les approfondir grâce au site internet des évêques catholiques qui s’appelle AELF.

Pourquoi Jésus a-t-il été baptisé ?

Tout le monde sait que le baptême fait entrer dans l’Eglise et pardonne les péchés. Il efface même ce qu’on appelle le péché originel. Or, Jésus n’a commis aucun péché ; et il n’a jamais été touché par le péché originel, lui qui est Dieu par nature. Alors, pourquoi ce baptême ? Dans notre évangile, Luc écrit que tout le peuple se faisait baptiser car il était en attente ; en attente de qui ? Du Messie, bien sûr, puisqu’on se demande si Jean-Baptiste ne serait pas le Messie attendu. Revenons à Jésus : il ne peut s’attendre lui-même. Donc, encore une fois, pourquoi ce baptême ? St Matthieu nous ouvre une piste ; devant l’étonnement de Jean-Baptiste qui se pose la même question que nous, Jésus répond : « C’est ainsi qu’il nous convient d’accomplir toute justice. » (Mt 3,15) Il ne faut pas entendre le mot justice dans le sens de procès, avocat, prison, jugement ; il faut l’entendre dans le sens de conformité à la volonté de Dieu : Jésus veut être ajusté à la volonté de Dieu. Et quelle est la volonté de Dieu ? C’est que son Fils devienne un véritable être humain, capable ainsi de sauver tous les hommes. Le baptême reçu par Jésus ne sert donc pas à effacer en lui des péchés qu’il n’a pas commis ; il sert à l’insérer de plus en plus dans l’humanité. Le baptême reçu par Jésus est, en ce sens, la continuation et l’approfondissement de sa nativité : Jésus est vraiment un homme au milieu des autres hommes. Vrai Dieu et vrai homme : c’est l’affirmation du Concile de Nicée que nous allons commémorer tout au long de 2025.

Le baptême qu’a reçu Jésus est-il le baptême qu’il nous donne ?

Non. Le baptême donné par Jean était comme une sorte de préparation du baptême donné par Jésus. Jésus a reçu un baptême de la part de Jean-Baptiste ; nous avons reçu – les catéchumènes recevront – le baptême que Jésus nous donne. Il y a un point commun : le geste de l’eau, un geste purificateur. Mais le baptême de Jean était reçu en vue de la rémission des péchés ; le baptême donné par Jésus efface vraiment les péchés. Jean annonçait que le baptême du Messie serait donné dans l’Esprit et le feu ; nous sommes effectivement baptisés et confirmés dans la puissance de l’Esprit. Le baptême que nous avons reçu nous plonge dans la mort et la résurrection de Jésus. La fête de notre baptême, ce n’est pas aujourd’hui, mais c’est la fête de Pâques.

Dernière question : Quelle est la place de ce baptême dans l’ensemble de la vie de Jésus ? Chez st Matthieu et st Luc, c’est une place charnière. Elle est à la jonction entre sa vie privée de Nazareth, dont nous ne savons quasiment rien, et sa vie publique qui le mène vers la Passion et la Résurrection. A partir de ce moment, nous allons suivre Jésus jusqu’à Pâques. Lors de son baptême, il est comme accrédité par le Père pour pouvoir remplir sa mission de sauveur ; lui qui nous baptise non seulement dans l’eau mais dans l’Esprit, il reçoit l’Esprit. La voix du Père reconnaît que l’homme Jésus porte bien son nom : il est « Dieu sauve » ; sa mission commence officiellement.

Bien sûr, chacune de ces questions demande à être approfondie. Encore une fois, je vous suggère de le faire en vous aidant des notes de votre Bible, et du site AELF, le site des évêques de langue française.

Mais, pour nous, aujourd’hui, quelle est l’importance de cette fête ? D’abord, c’est de nous réjouir pour Jésus : il est vraiment notre sauveur, venu au milieu de nous. Mais si le Père s’adresse à lui en disant : « Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi je trouve ma joie », rien ne nous interdit de recevoir ces paroles pour nous-mêmes. Au moment où notre évêque viendra chez nous, demain soir, ouvrir l’année jubilaire, cette année durant laquelle nous allons célébrer le Christ vrai Dieu et vrai homme, il est merveilleux d’accueillir pour nous les mots du Père : nous sommes, avec Jésus, à sa suite, les fils et les filles bien-aimés du Père. Vous savez que la spiritualité de Noël est la spiritualité du merveilleux échange : le Fils se fait homme pour que les hommes deviennent fils et filles de Dieu. Les pères de l’Eglise, ces théologiens des tous premiers siècles, parlent même de la divinisation de l’homme. Notre vocation humaine est de devenir des dieux non pas à la place du Seigneur, mais avec lui.

Célébrons donc la fête du baptême de Jésus, ainsi que l’année jubilaire, comme un appel à vivre notre vocation de frères et sœurs du Christ, membres de l’Eglise et temples de l’Esprit : « Toi, tu es mon fils – ma fille – bien-aimé ; en toi je trouve ma joie. »