24 décembre 2020 NOËL
par le Père Jean Paul Cazes
Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime.
Ce soir, le chant des anges est notre chant.
C’est ce que proclame la banderole circulaire qui entoure la Trinité qui se trouve en face de vous, sur le cul de four du chœur.
Quelle chose étonnante que de chanter la gloire d’un nouveau-né ! Non seulement il n’a rien fait, mais ses parents n’appartiennent pas à la haute société ; son village natal n’est qu’un point minuscule sur la carte ; son pays est une des provinces les plus reculées et les plus pauvres de l’immense empire de Rome.
Rien donc qui parle de la gloire au sens où nous l’entendons de manière habituelle. Pas de haute naissance, pas de gloire militaire, pas de décorations, pas de renommée artistique ou financière.
Et pourtant, nous avons raison de chanter : « Gloire … ! »
Parce que ce qui rend gloire à notre Dieu, c’est l’homme vivant.
Dieu est glorifié quand l’être humain, quel qu’il soit, de quelque pays qu’il soit, et – j’ose dire – de quelque religion ou athéisme qu’il soit, est mené à la vie.
Je pense, bien sûr, spontanément, à notre vie corporelle et à sa fragilité individuelle et collective. Je pense à tous ces efforts que nous avons consentisdepuis des mois, et que nous allons consentir encore pendant longtemps, pour que la maladie se répande le moins possible et soit finalement maîtrisée. Je pense à tous les efforts consentis par le personnel de santé, à toutes ces recherches scientifiques pour trouver un vaccin réellement efficace.
Mais je pense tout autant à tout ce qui est fait par tant de personnes, pour humaniser la crise que nous traversons. Tous ces humbles gestes du quotidien pour garder des liens avec des personnes isolées. Toutes ces opérations de grande ampleur menées par des organisations caritatives ou humanitaires pour soulager les détresses.
Par contre, je regrette que toute la vie culturelle ait été classée dans ce qui n’est pas essentiel ; car, pour paraphraser l’évangile, que sert à l’homme de garder sa santé s’il vient à perdre son âme ?
Notre Dieu, le Dieu révélé par Jésus-Christ, est glorifié par tous les efforts qui humanisent la vie. Comme un père est glorifié par la réussite de ses enfants.
Chaque fois que nous laissons notre porte et notre cœur ouverts, sans nous refermer sur nos craintes pourtant légitimes, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois qu’un être humain est libéré de son esclavage en Lybie ou ailleurs, libéré de ses addictions et de ses enfermements, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois qu’un être humain est sur le chemin d’une guérison physique ou mentale, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois qu’un être humain accède à plus de savoir, plus de dignité, de capacité, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois qu’une main fraternelle se tend pour relever quelqu’un, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois qu’à un enfant, fille comme garçon, est reconnu le droit d’être aimé, soigné, éduqué, instruit, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois qu’une personne handicapée est reconnue dans sa dignité d’être humain, notre Dieu est glorifié.
Chaque fois que l’humanité est orientée, à travers les échecs et les réussites de cette vie, vers la vie en plénitude du royaume des cieux, notre Dieu est glorifié.
Car notre Dieu n’est pas jaloux de nous ; sa gloire est là où nous cherchons à humaniser notre vie personnelle et collective. Humaniser notre vie, c’est à dire l’orienter vers son véritable accomplissement qui est au-delà de cette terre, dans la plénitude du Royaume.
Une des choses extraordinaires de Noël, c’est que Dieu vient chez nous pour nous apprendre à être homme. Dieu, par son Fils, est plus homme que chacun de nous. Souvent, nous avons tendance à opposer humanité et divinité ; certes, elles sont bien distinctes. Et pourtant, grâce à Jésus, elles sont réconciliées. Par Jésus, Dieu notre Père nous apprend à être homme, il nous apprend à humaniser notre vie, nos relations.
Et chaque fois que nous humanisons notre vie, nous nous approchons de Lui.
Voilà pourquoi nous avons raison de chanter Gloire à Dieu ;
et paix à tous les hommes de tous les temps car Dieu les aime.