Jr 33,14-16 Psaume 24 Th 3,12-4,2 Lc 21,25-28+34-36
Pourquoi un évangile aussi sévère au début de l’Avent ? Certes, nous savons que l’Avent est un temps de préparation, et même de pénitence. Mais une pénitence en vue de la joie : l’Avent est un temps tourné vers la joie de la naissance de Jésus. Alors, pourquoi parler, comme dimanche dernier, de signes dans le ciel, des nations affolées et d’autres choses semblables ?
Je voudrais prendre une comparaison. Vous voyez tous, plus ou moins bien d’ailleurs, le tableau de la crucifixion qui orne le fond du chœur de notreéglise. Du fait de sa place, il ferme physiquement l’église. Mais il a une autre fonction que celle de fermer l’église. Il est comme une seconde porte. En effet, l’église n’est pas seulement un bâtiment dans lequel on entre puis on sort. L’église est un bâtiment qui est le symbole de notre chemin spirituel. On entre dans l’église après s’être purifié sur le seuil; puis on se rassemble autour de la parole de Dieu ; on s’avance vers l’autel pour communier au corps eucharistique du Christ. Le chemin spirituel ne consiste pas ensuite à rebrousser chemin mais à s’avancer vers le Royaume : ainsi, le tableau de la crucifixion est la seconde porte de l’église, la porte qui permet au chemin de trouver son accomplissement dans le Royaume de Dieu.
Le temps de l’Avent est aussi un chemin qui passe par la célébration de la naissance du Christ mais qui, comme le retable de notre église, ouvre sur ce que la naissance du Christ annonce. Et ce que chaque Noël annonce, c’est la venue définitive du Christ. La venue du Christ est un des thèmes de nos lectures : « Voici venir des jours …où j’accomplirai la parole de bonheur que j’ai adressée à la maison d’Israël » écrit Jérémie. Paul, aux chrétiens d’Ephèse, évoque « la venue de notre Seigneur Jésus avec tous les saints. » Quant à Jésus, il dit : « on verra le Fils de l’homme – c’est à dire lui-même–venir dans les nuées avec puissance et grande gloire. »
La préface que je dirai tout à l’heure juste avant le Sanctus parle des deux venues du Christ : « il est déjà venu en assumant l’humble condition de notre chair … ; il viendra de nouveau, revêtu de sa gloire… » St Bernard, au XIIème siècle, parle même d’une troisième venue qui est celle que nous vivons quand nous célébrons un sacrement, l’eucharistie en particulier : le Christ ressuscité vient en nous.
Ma question de départ était : pourquoi un tel évangile rempli de bruits et d’effroi en ce temps tourné vers la joie de Noël ? Entre prêtres, lors de notre conseil de mercredi dernier, nous nous sommes posé cette question. On voit bien un tel message lors du dernier dimanche de l’année. Mais pourquoi aujourd’hui ? Après débat, nous avons conclu que cet évangile remet l’Avent, et donc aussi Noël, dans sa juste perspective. De même que notre retable fermephysiquement notre église mais ouvre sur le but du chemin spirituel que nous vivons dans nos liturgies, de même aussi Noël est bien plus qu’une gaité sans lendemain : c’est la porte ouverte vers la seconde venue de Jésus. Le lendemain spirituel de Noël n’est pas le 26 décembre ; c’est la venue définitive du Fils de l’homme qui apporte la rédemption et le salut à celles et ceux qui l’auront attendu.
Jésus nous dit comment attendre, et donc comment préparer, sa venue définitive. Je ne sais si vous avez remarqué les attitudes physiques qu’il nous recommande : « …redressez-vous et relevez la tête …vous tenir debout devant le Fils de l’homme… »Nous tenir debout parce que notre rédemption approche ! Ce n’est pas un appel à cultiver notre orgueil, ce qui serait vraiment déplacé de la part du Christ. Se tenir debout, c’est l’attitude du ressuscité. Comme le disent les Actes des Apôtres, Jésus s’est relevé d’entre les morts, il s’est mis debout. Ce qui veut dire que le premier évangile du premier dimanche de l’année liturgique et de l’Avent nous invite à affirmer notre foi et notre espérance en la résurrection du Christ et donc en la nôtre. C’est dans cette foi qu’il convient de situer Noël. Noël n’est pas uniquement une fête de naissance, mais une fête qui annonce la résurrection. Comme la peinture du chœurne ferme pas seulement le fond de l’église mais ouvre notre regard sur la vie future, Noël ne se restreint pas à la gaité passagère d’un soir mais ouvre notre foi sur la résurrection et la vie du royaume promis.
Ce n’est pas une faute que de se réjouir un jour de Noël et de prévoir une bonne table ; ce n’est pas une erreur de fêter particulièrement les enfants et leur offrir des cadeaux. Mais ce serait une erreur, pour nous, fils et filles de Dieu, que de nous tromper sur le sens profond de la fête de Noël : le fils de Dieu s’est incarné dans le sein de Marie pour venir offrir sa vie.L’incarnation du Fils de Dieu est orientée vers la rédemption : « …ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »
Je souhaite à chacun de vous un bel Avent.