Ezékiel 34,11-12+15-17 Psaume 22 1 Corinthiens 15,20-26+28 Matthieu 25,31-4
Par le père Jean Paul Cazes
Par tout son enseignement – surtout son enseignement en paraboles – par toute sa vie, sa mort et sa résurrection, Jésus est venu nous annoncer le Royaume. Dans les évangiles, on trouve différentes expressions : royauté royaume, règne. Mais c’est toujours la royauté de Dieu, le royaume des cieux, le règne de Dieu. Jésus lui-même se tient à distance de ces expressions ; il n’est jamais question, dans sa bouche, de sa royauté, de son royaume ni de son règne. Vous savez combien il est prudent face au titre de roi ; il ne l’acceptera de la bouche de Pilate que lorsqu’il sera clair qu’il n’est pas roi à la manière des rois de la terre. La seule couronne qu’il portera, durant sa vie terrestre, est la couronne d’épines. Le royaume qu’il annonce est un royaume de service : lui, le Maître et Seigneur, il lave les pieds de ses disciples et leur demande d’imiter son geste. C’est dans la lumière de la résurrection qu’il accepte le titre de roi comme le dit le premier verset de notre évangile : « Quand le Fils de l’homme viendra sans a gloire, et tous les anges avec lui, alors il siégera sur son trône de gloire. »
La vie humaine de Jésus est une incarnation de l’existence du Fils unique du Père. Or, le Fils unique est issu du Père et se tourne vers le Père comme le dit le premier verset de l’évangile de Jean : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers Dieu ». De la même manière, la vie de Jésus vient de son Père et retourne au Père. Tout, dans la vie humaine de Jésus est centré sur le Père. Le royaume annoncé dans les paraboles est le royaume du Père ; à tel point que Paul écrit aux chrétiens de Corinthe : « Alors, tout sera achevé quand le Christ remettra le pouvoir royal à Dieu son Père … »
Ce royaume de Dieu que Jésus est venu annoncer, il nous l’offre comme une promesse, comme un don actuel et comme une collaboration. Comme une promesse, car ce royaume ne sera pleinement achevé que lors du retour du Christ. Comme un don actuel car, comme dit Jésus, « le royaume est parmi vous » ; on peut aussi traduire : « le royaume est en vous », en chacun de nous par le baptême et la confirmation. Le royaume de Dieu demande et offre une collaboration de notre part ; rappelez-vous la parabole de dimanche dernier, parabole des talents dans laquelle le maître félicite les deux premiers serviteurs d’avoir fait fructifier ses biens.
Mais nous ne sommes pas que des collaborateurs du royaume : nous sommes appelés, grâce à Jésus, à la même dignité que lui ; nous sommes appelés à devenir rois avec lui. Rappelez-vous le chant : « Peuple de prêtres, peuple de rois, assemblée des saints, peuple de Dieu … » ; les paroles de ce chant s’inspirent de ce que Pierre écrit dans sa première épître. Un royaume humain est composé d’un roi et de sujets. Dans le royaume de Dieu, annoncé par Jésus, il n’y a pas de sujets. Il n’y a que des rois. Voilà pourquoi nous fêtons le couronnement de Marie comme signe de notre propre couronnement. Le désir du Père, pour ses enfants que nous sommes, est infiniment plus qu’une simple amélioration morale : il souhaite nous faire partager sa dignité !
Mais comment ? C’est simple : en faisant partie de sa cour. La cour de notre roi : les affamés de toutes sortes de faim, les assoiffés de toutes sortes de soif, les étrangers d’où qu’ils viennent y compris les étrangers à notre foi, les nus et les démunis de tous liens humains, les malades et les handicapés, les prisonniers dans leurs rancunes et leurs addictions. Et la liste n’est pas close. Voilà les ducs, les comtes et les barons de notre roi.
Mais attention : essayons, autant que possible, de saisir l’intention de Jésus. Il ne nous donne pas un cours de morale sociale ; il nous donne des points de repère pratiques pour pouvoir reconnaître, dans un petit enfant, né dans une misérable grotte au milieu d’un pays sans gloire, le roi de l’univers.